23 avril 2010
Le réveil des ambitions à droite
Si la prochaine élection présidentielle n'est que dans deux ans, la liste des candidats potentiels à droite ne cesse de s'allonger depuis l'échec de la majorité aux élections régionales. Les uns (Alain Juppé - le seul à l'avoir dit publiquement -, François Fillon voire Jean-François Copé) apparaissent comme des recours en cas de non-candidature de Nicolas Sarkozy, qui a annoncé qu'il se déterminerait "à la fin de l'été ou au début de l'automne 2011". Les autres sont prêts à se lancer face au président sortant. En concertation avec lui, à l'image de Jean-Louis Borloo, ou en opposition, comme Dominique de Villepin.
Nicolas Sarkozy conserve cependant encore pour l'élection présidentielle la préférence d'une majorité de sympathisants UMP (51%), loin devant François Fillon (11%) et Dominique de Villepin (8%) (1). Mais les anciens premiers ministres Édouard Balladur et Jean-Pierre Raffarin, ainsi que le président de l'Assemblée nationale, Bernard Accoyer, s'inquiètent déjà. Tous ont en tête le spectre d'un "21 avril à l’envers" : en 2002, la gauche, divisée, n’avait pas pu accéder au second tour de la présidentielle.
(1) Sondage Ifop pour Le Journal du Dimanche réalisé auprès d'un échantillon représentatif de 956 personnes les 15 et 16 avril 2010.
Dominique de Villepin, le gaullisme anti-Sarkozy
58 ans en mai 2012
Ancien premier ministre, membre du bureau politique de l'UMP
Le 25 mars dernier, Dominique de Villepin, qui n'a jusque-là jamais été candidat à une élection, a fait un pas supplémentaire vers une candidature présidentielle en esquissant un programme alternatif à la politique libérale de Nicolas Sarkozy et François Fillon. Prochaine étape : le lancement de son propre parti, le 19 juin.
Le principal atout de celui qui fut ministre des affaires étrangères lors de la crise irakienne de 2003 est de s'approprier un message gaulliste susceptible de séduire des électeurs au-delà de la droite.
Mais ses handicaps sont nombreux. Tout d'abord, il n'est pas certain que la poignée de députés villepinistes soit disposée à le suivre jusqu'à une rupture avec l’UMP, sans parler de ceux entrés au gouvernement (Bruno Le Maire et Georges Tron). Ensuite, contrairement à Nicolas Dupont-Aignan (Debout la République), d'ores et déjà candidat à l’élection présidentielle, Dominique de Villepin n'a pas toujours défendu, notamment à Matignon, une ligne gaulliste sociale. Enfin, il devra prouver que sa candidature est porteuse d'un projet politique et pas seulement, dans le contexte de l'affaire Clearstream, d'une rancœur personnelle à l'égard de Nicolas Sarkozy.
Hervé Morin, le centre droit libéral
50 ans en mai 2012
Président du Nouveau Centre, ministre de la défense
Hervé Morin en est persuadé : le Nouveau Centre, parti créé en 2007 par les "bayrouistes" ayant soutenu Nicolas Sarkozy au second tour de l'élection présidentielle, doit impérativement présenter un candidat en 2012 afin de marquer son autonomie vis-à-vis de l'UMP, dont il a été l'allié fidèle à tous les scrutins. Président du parti, le ministre de la défense apparaît comme le candidat naturel et s'interroge d'ores et déjà sur sa sortie du gouvernement.
Présentant sa candidature comme un second choix au sein de la majorité, Hervé Morin parie sur la résurgence d'un clivage bipolaire au sein de la droite française, entre d'un côté une droite "bonapartiste" (le RPR puis l'UMP) et de l'autre un centre droit "orléaniste" (l'UDF puis le Nouveau Centre).
Reste à savoir si cette analyse, qui correspond au paysage politique entre 1978 et 1998, peut s'appliquer dix ans après la création de l'UMP, qui rassemble au moins en partie toutes les familles de la droite française : néogaullistes, démocrates-chrétiens, libéraux et radicaux. Une candidature de Jean-Louis Borloo, également issu de l'UDF, grignoterait toutefois l'espace politique d'Hervé Morin, déjà bordé sur sa gauche par son ancien mentor François Bayrou.
Jean-Louis Borloo, le centre droit social et écolo
61 ans en mai 2012
Ministre de l’écologie, président du Parti radical et vice-président du conseil national de l'UMP
L'idée d'une candidature de Jean-Louis Borloo est apparue dans la foulée de l'échec de la majorité présidentielle aux récentes élections régionales. Il s'agirait d'élargir l’offre de la majorité sortante en présentant, aux côtés de celle de Nicolas Sarkozy, la candidature de cet ancien porte-parole de l'UDF.
L'intéressé présenterait le double avantage de garder captifs dans la mouvance de l'UMP les électeurs de centre droit - également convoités par Hervé Morin - mais aussi potentiellement de mordre sur l'électorat d'Europe Écologie
Sur le papier, Jean-Louis Borloo peut compter sur le soutien des radicaux, mais aussi de démocrates-chrétiens de l'UMP comme Marc-Philippe Daubresse. Si les radicaux de centre gauche ont déjà tenté leurs chances avec Michel Crépeau en 1981, puis Christiane Taubira en 2002, ce serait la première candidature présidentielle d'un radical de centre droit. Reste à savoir si l'Élysée prendra le risque de susciter un prétendant supplémentaire à droite, ce qui ne semble pas à l'ordre du jour. Mais Jean-Louis Borloo compte bien de toute façon monter en puissance dans la dernière partie du quinquennat. Pourquoi pas, même, en succédant à François Fillon fin 2010 à Matignon.
Alain Juppé, le recours chiraquien
66 ans en mai 2012
Maire de Bordeaux, ancien premier ministre, membre du bureau politique de l'UMP
Le maire de Bordeaux cherchait l'occasion de revenir dans le débat politique national depuis son échec aux élections législatives de 2007. Il a finalement annoncé qu'il concourrait aux primaires internes à l'UMP si Nicolas Sarkozy - qu'il considère comme le "candidat naturel de la majorité en 2012" - n'était pas en lice pour sa propre succession. Dans les pas de Jacques Chirac, celui qui fut son premier ministre avant la dissolution de 1997 vient de se démarquer du sarkozysme en affirmant qu'il n’avait "jamais cru à la rupture".
Si Dominique de Villepin est aujourd’hui dans une démarche extérieure à l'UMP, Alain Juppé semble le mieux placé des chiraquiens à l'intérieur d'un parti qu'il avait présidé avant Nicolas Sarkozy. Même si c’est Michèle Alliot-Marie qui, avec Le Chêne, a reconstitué autour d'elle une partie des réseaux issus du RPR, dont elle fut la dernière présidente Fondateur en 1997 du club France Moderne, Alain Juppé va donc prochainement lancer son think tank.
Reste à savoir si l'opinion publique retiendra de lui l'image de l'éphémère ministre de l'écologie de 2007 ou celle de l'ancien premier ministre libéral "droit dans ses bottes". Voire de l’élu condamné en 2004 dans l'affaire des emplois fictifs du RPR et de la mairie de Paris.
François Fillon, le recours sarkozyste
58 ans en mai 2012
Premier ministre en exercice, membre du bureau politique de l'UMP
Sa discrétion ne doit pas faire illusion. Lors de l'élection présidentielle de 2002, François Fillon s'était rangé derrière Jacques Chirac. En 2007, derrière Nicolas Sarkozy. En 2012, si ce dernier renonce à une nouvelle candidature, François Fillon - qui qualifie aujourd'hui cette hypothèse de "science-fiction" - n'a pas vocation à s'effacer au profit des chiraquiens Alain Juppé, Michèle Alliot-Marie et Jean-François Copé ou du sarkozyste Xavier Bertrand.
Le premier ministre dispose d'ailleurs de solides réseaux dormants, historiquement issus du séguinisme. Même si, depuis son livre publié en 2006 (La France peut supporter la vérité, Albin Michel), il a de fait idéologiquement tourné le dos au gaullisme social de son ancien mentor Philippe Séguin pour rallier le libéralisme de Nicolas Sarkozy.
Ses autres atouts sont sa cote d'amour auprès des ministres et des députés UMP et sa cote de popularité auprès des Français, qui dépasse celle de Nicolas Sarkozy. Rallié à celui-ci après son éviction du gouvernement en 2005, François Fillon, qui devrait quitter Matignon à la fin de l’année, apparaît aujourd'hui comme le meilleur recours des sarkozystes face aux chiraquiens.
Jean-François Copé, pas si pressé
48 ans en mai 2012
Ancien ministre, président du groupe UMP à l'Assemblée nationale
Jean-François Copé affiche publiquement ses ambitions élyséennes (2). Mais pas pour l'élection présidentielle de 2012. Plutôt pour celle de 2017, lorsque Nicolas Sarkozy ne pourra plus se représenter... s'il a été réélu.
Sauf que ce scénario, qui permet de ne pas entrer en concurrence directe avec l'actuel président de la République, part du postulat d'une nouvelle candidature de ce dernier. Et si le président sortant ne se représentait pas dans deux ans ?
Dans cette hypothèse, il sera difficile pour Jean-François Copé de ne pas entrer en lice. D'autant plus qu'il partage avec François Fillon la faveur des députés UMP et qu'il a déjà lancé son club de réflexion, Génération France, structuré par l'ancien ministre chiraquien Christian Jacob.
Candidat ou non, le président du groupe UMP à l’Assemblée nationale, qui travaille étroitement avec son homologue du Sénat, Gérard Longuet, se veut pour 2012 le pourvoyeur d'idées de la majorité, comme il l'a montré en se saisissant de la question de l'interdiction du voile islamique intégral.
Sur le fond, Jean-François Copé est proche de la droite libérale "décomplexée" autrefois théorisée par Nicolas Sarkozy, avant que ce dernier n'ajoute dans ses discours une dose de républicanisme emprunté à Alain Bauer et Henri Guaino.
(2) lire sur Jean-François Copé le remarquable travail journalistique de Solenn de Royer (La Croix) et Frédéric Dumoulin (AFP) : Copé, l'homme pressé (L'Archipel).
Laurent de Boissieu
La Croix, 22 avril 2010 (papier légèrement remanié pour mon blog)
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06 juillet 2009
Nicolas Sarkozy embauche Michel Rocard et Alain Juppé
En confiant aux deux anciens premiers ministres Michel Rocard (PS) et Alain Juppé (UMP) la présidence de la commission chargée de réfléchir aux "priorités justifiant un effort exceptionnel d'investissement", financé par l'emprunt national annoncé le 22 juin devant le Parlement réuni en congrès, Nicolas Sarkozy est pleinement dans son rôle de président de la République au-dessus des partis. J'ai suffisamment critiqué sa volonté de rompre avec la vision gaulliste de la fonction présidentielle pour ne pas saluer aujourd'hui... cette rupture dans la rupture !
Certes, il y a également une arrière pensée politicienne : donner l'impression de poursuivre l'ouverture à gauche. Lors du dernier remaniement ministériel, aucune nouvelle personnalité issue de l'opposition n'avait en effet intégré l'équipe de François Fillon.
Dans ce contexte, l'appel à Michel Rocard se veut un symbole de la poursuite de cette politique. Même si, en réalité, il n'en est rien : l'ouverture consiste à élargir son gouvernement à des personnalités politiques extérieures à la majorité. Comme François Mitterrand et Michel Rocard en 1988 avec des ex-UDF, puis Nicolas Sarkozy et François Fillon en 2007 avec des ex-PS.
Elle ne consiste pas à nommer une commission de réflexion politiquement pluraliste. Ce qui relève non de l'ouverture mais du sens bien compris de l'intérêt national (même si, in fine, c'est bien entendu au gouvernement de prendre ses responsabilités politiques et de trancher). À l'image des commissions ou comités présidés par Marceau Long en 1987 (réforme de la nationalité), Pierre Avril en 2002 (statut pénal du président de la République), Bernard Stasi en 2003 (application du principe de laïcité), Edouard Balladur en 2007 (révision de la Constitution) et 2008 (réforme des collectivités locales).
Mais faisons fi de cette arrière pensée politicienne en espérant que la montagne n'accouchera pas d'une souris, et que le futur emprunt national permettra effectivement de lancer une politique keynésienne d'investissements publics de long terme.
Contentons-nous simplement de regretter, plus globalement, qu'il ait fallu attendre la crise pour enfin sortir de le pensée unique néolibérale, avec la crainte que l'emprunt national ne serve alors pas à lancer cette autre politique mais simplement à renflouer les caisses de l'État.
Un test pour savoir si Nicolas Sarkozy a véritablement changé, quitte à affronter les foudres des gardiens du dogme, à Paris (de son mentor Edouard Balladur aux enfants de la Fondation Saint-Simon), Bruxelles (Commission européenne), Francfort (BCE) et Washington (FMI). Guaino 1 - Fillon 0 ?
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31 août 2006
Jospin l'ouvre, Juppé la ferme
Ouverture du blog de Lionel Jospin :
"La période qui s'ouvre cet automne étant décisive pour la suite, je souhaite m'y exprimer et contribuer à éclairer les choix qui sont devant nous.
Comme tous les socialistes, je vais participer au débat politique, avec vous, vous faire partager mes opinions, mes positions et bien sûr, recueillir vos commentaires, vos impressions, vos sentiments."
... et fermeture provisoire du blog d'Alain Juppé :
"Nous voici donc en campagne (NDLR: une élection municipale complémentaire est organisée à Bordeaux). Rien n’est gagné d’avance. C’est avec tous les Bordelais que nous comptons bâtir notre projet pour le Bordeaux de 2015. Je vais donc y consacrer tout mon temps et toute mon énergie. C’est pourquoi je vais interrompre provisoirement ce blog-notes. J’espère que vous le comprendrez."
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