23 juillet 2009
CSA : une bien étrange vision du paysage politique
Le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) a adopté le 21 juillet un nouveau principe de pluralisme pour les temps de parole des personnalités politiques. Au-delà de ce nouveau principe (inutile de recopier le communiqué du CSA : suivre le lien), il y a quelque chose de bien étrange dans la vision du paysage politique par le CSA.
Le CSA parle de "majorité présidentielle" (membres du gouvernement, personnalités appartenant à la majorité parlementaire, collaborateurs du chef de l'État) et d'"opposition parlementaire". Fort bien. Mais il institue une toisième catégorie : "les formations n'appartenant ni à la majorité ni à l'opposition" avec "celles qui ne sont pas représentées au Parlement".
Qu'une troisième catégorie concerne les partis non représentés au Parlement est tout à fait légitime (avec l'habituelle question subsidiaire : faut-il inclure le Parlement européen ? Bref, concrètement, faut-il ou non inclure le FN ?). Mais que cette catégorie concerne également les partis "n'appartenant ni à la majorité ni à l'opposition" est totalement absurde.
Tout parti appartient en effet soit à la majorité soit à l'opposition. Il n'existe pas sur ce clivage de troisième possibilité, de parti ni dans la majorité ni dans l'opposition, même si cette dernière comporte une myriade de positionnements possibles (de l'extrême droite à l'extrême gauche en passant par le centre et la gauche).
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21 juillet 2009
Le PS sert-il encore à quelque chose ?
Bernard-Henri Lévy a jeté un pavé dans la mare en déclarant que, selon lui, le PS était "mort" et qu'il fallait donc le "dissoudre", c'est-à-dire "changer le nom".
Changer de nom ne servirait en réalité pas à grand chose tant que le PS ne parviendra pas à opérer une double révolution :
- le PS ne sert politiquement à rien s'il n'est pas capable de désigner puis de se mettre suffisamment tôt en ordre de bataille derrière un présidentiable : telle est la logique de la Ve République, que l'on soit pour ou contre cette logique (tant critiquée par François Mitterrand mais qu'il avait si bien assimilée). Comme Nicolas Sarkozy au sein de l'UMP, ce candidat doit imposer son programme, et non l'inverse (le malheur de Ségolène Royal en 2007). Et ceux qui ne sont pas contents n'ont qu'à fermer leur gueule (comme Michèle Alliot-Marie au sein de l'UMP en 2007) ou démissionner (comme Nicolas Dupont-Aignan, démissionnaire de l'UMP en 2007 également).
- le PS doit en finir avec son double discours : anti-libéral dans l'opposition, social-libéral au pouvoir. Ce n'est pas nouveau, la SFIO déjà était révolutionnaire dans le discours et réformiste dans les faits. Le positionnement social-libéral assumé de Bertrand Delanoë ou Ségolène Royal et anti-libéral assumé de Benoît Hamon auraient pu clarifier les choses l'année dernière. Les militants du PS en ont voulu différemment, mais François Hollande hier et Martine Aubry aujourd'hui incarnent ce PS qui ne veut pas trancher (la scission du Parti de Gauche de Jean-Luc Mélenchon est à ce titre une bonne nouvelle, même si elle n'a pas entraîner tous les anti-libéraux du PS). "On ne sort de l'ambiguïté qu'à ses dépens", enseigne le cardinal de Retz. Certes, mais de l'ambiguïté au double discours il y a un pas allégrement franchi par un parti dont les électeurs sanctionnent l'incapacité à définir une ligne politique claire et assumée.
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07 juillet 2009
Vous avez dit MoDem ?
Nicolas About, président de la commission des affaires sociales du Sénat, a été élu aujourd'hui président du groupe Union centriste (UC) par 16 voix contre 11 à Jean-Léonce Dupont et un vote blanc. Victoire ! ont aussitôt crié les amis de François Bayrou sur le site Internet du parti : le MoDem a battu le Nouveau centre !
Certes. Mais drôle de MoDem tout de même...
En analysant la dizaine de votes depuis les dernières sénatoriales où le groupe UC s'est divisé entre majorité et opposition (1), on s'aperçoit que Nicolas About (2) a systématiquement voté comme les élus de la majorité, c'est-à-dire notamment comme ceux du Nouveau centre ! Et absolument jamais comme les sénateurs "bayrouistes" du MoDem !
Consolation pour l'Alliance centriste, le nouveau parti de Jean Arthuis (président de la commission des finances du Sénat), qui avait renoncé à présenter son propre candidat (François Zocchetto) : c'est Muguette Dini qui devrait prendre la présidence de la commission des affaires sociales du Sénat.
(1) voir notre radioscopie du groupe Union Centriste (UC) du Sénat (N.B.: j'avais à l'époque comptabilisé Nicolas About en tant que MoDem-RC, vu qu'il avait signé l'appel Rassembler les centristes)
(2) comme d'ailleurs son prédécesseur Michel Mercier, entré au gouvernement : seuls les ignorants on pu parler d'ouverture à propos de cette nomination
14:37 | Lien permanent | Commentaires (4) | Facebook | |
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Le dimanche, ce sera ma puce ...ou le PUCE
Un petit point au sujet de la "proposition de loi sur les dérogations au principe du repos dominical dans les zones touristiques et thermales et les grandes agglomérations pour les salariés volontaires" :
Ce qui ne change pas :
- Le principe du repos hebdomadaire dominical, issu de la loi du 13 juillet 1906, est réaffirmé (ne vous inquiétez pas, c'est pour mieux vous manger mes enfants !!!).
- Les exceptions déjà existantes sont maintenues telles quelles : autorisation d'ouvrir cinq dimanches par an par commerce ainsi que, toute l'année, pour certaines activités (transports, musées, cinémas, parcs d'attractions, hôtels, cafés, restaurants, magasins de fleurs naturelles, entreprises de journaux et d'information, entreprises de pompes funèbres, ...).
- La proposition de loi ne s'applique pas en Alsace-Moselle (droit local : vous avez dit République indivisible ???).
Ce qui change :
- Dans les "zones touristiques ou thermales" (494 communes + 29 "zones touristiques d'affluence exceptionnelle ou d'animation culturelle permanente") : tous les types de commerces auront le droit d'ouvrir le dimanche (et plus seulement ceux liés aux loisirs d'ordre sportif, récréatif ou culturel), sans contrepartie légale pour les salariés.
- Les commerces alimentaires de détail pourront ouvrir le dimanche jusqu'à 13 heures (au lieu de 12 heures actuellement).
- Pour les autres commerces de détail, création dans les unités urbaines de plus d'un million d'habitants de "périmètres d'usage de consommation exceptionnel" (PUCE), établis par le préfet sur demande du conseil municipal. Il doit s'agir de "circonstances locales particulières" liées soit à des "usages de consommation de fin de semaine", soit à "la proximité immédiate d'une zone frontalière où il existe un usage de consommation de fin de semaine". Dans la pratique, ne seraient concernées que les grandes agglomérations de Paris, Aix-Marseille et Lille (l'exposé des motifs de la PPL notant qu'il "n’existe pas d'usage de consommation le samedi et le dimanche dans l'agglomération lyonnaise"). Le travail dominical s'y effectuera en théorie sur la base du volontariat après accord collectif ou, à défaut, référendum d'entreprise, avec contrepartie salariale (doublement au moins du salaire).
Trois remarques :
- le but de cette loi est de légaliser une poignée d'illégalités au lieu de les sanctionner !
- le volontariat, c'est de la rigolade dans le rapport de force employé/employeur.
- tout salarié travaillant par exception le dimanche devrait légalement avoir droit à un repos compensateur et à une compensation salariale.
P.S.: je ne reviens même pas sur cet argument de Nicolas Sarkozy (merci Libé) :
Le plus scandaleux, ce n'est pas que Mme Obama et ses filles ne puissent pas "visiter" les magasins parisiens le dimanche, le plus scandaleux c'est que sur un coup de fil Nicolas Sarkozy puisse les faire ouvrir !
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06 juillet 2009
Nicolas Sarkozy embauche Michel Rocard et Alain Juppé
En confiant aux deux anciens premiers ministres Michel Rocard (PS) et Alain Juppé (UMP) la présidence de la commission chargée de réfléchir aux "priorités justifiant un effort exceptionnel d'investissement", financé par l'emprunt national annoncé le 22 juin devant le Parlement réuni en congrès, Nicolas Sarkozy est pleinement dans son rôle de président de la République au-dessus des partis. J'ai suffisamment critiqué sa volonté de rompre avec la vision gaulliste de la fonction présidentielle pour ne pas saluer aujourd'hui... cette rupture dans la rupture !
Certes, il y a également une arrière pensée politicienne : donner l'impression de poursuivre l'ouverture à gauche. Lors du dernier remaniement ministériel, aucune nouvelle personnalité issue de l'opposition n'avait en effet intégré l'équipe de François Fillon.
Dans ce contexte, l'appel à Michel Rocard se veut un symbole de la poursuite de cette politique. Même si, en réalité, il n'en est rien : l'ouverture consiste à élargir son gouvernement à des personnalités politiques extérieures à la majorité. Comme François Mitterrand et Michel Rocard en 1988 avec des ex-UDF, puis Nicolas Sarkozy et François Fillon en 2007 avec des ex-PS.
Elle ne consiste pas à nommer une commission de réflexion politiquement pluraliste. Ce qui relève non de l'ouverture mais du sens bien compris de l'intérêt national (même si, in fine, c'est bien entendu au gouvernement de prendre ses responsabilités politiques et de trancher). À l'image des commissions ou comités présidés par Marceau Long en 1987 (réforme de la nationalité), Pierre Avril en 2002 (statut pénal du président de la République), Bernard Stasi en 2003 (application du principe de laïcité), Edouard Balladur en 2007 (révision de la Constitution) et 2008 (réforme des collectivités locales).
Mais faisons fi de cette arrière pensée politicienne en espérant que la montagne n'accouchera pas d'une souris, et que le futur emprunt national permettra effectivement de lancer une politique keynésienne d'investissements publics de long terme.
Contentons-nous simplement de regretter, plus globalement, qu'il ait fallu attendre la crise pour enfin sortir de le pensée unique néolibérale, avec la crainte que l'emprunt national ne serve alors pas à lancer cette autre politique mais simplement à renflouer les caisses de l'État.
Un test pour savoir si Nicolas Sarkozy a véritablement changé, quitte à affronter les foudres des gardiens du dogme, à Paris (de son mentor Edouard Balladur aux enfants de la Fondation Saint-Simon), Bruxelles (Commission européenne), Francfort (BCE) et Washington (FMI). Guaino 1 - Fillon 0 ?
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