Que pense vraiment Nicolas Sarkozy ? (15 janvier 2007)

Surprise ! Seul candidat, Nicolas Sarkozy a obtenu 100% des suffrages exprimés des adhérents de l'UMP. Mais ne le blâmons pas. Blâmons plutôt ceux qui ont renoncé à présenter leur candidature face à lui...

On peut en revanche légitimement s'interroger, alors que la droite est prompt à dénoncer le manque de convictions de Ségolène Royal, sur la force des convictions de Nicolas Sarkozy. Trois exemples issus de son discours d'entrée en campagne, hier, Porte de Versailles à Paris.

 

1. Communautarisme et discrimination positive

1. 1. Le 20 novembre 2003, lors de l'émission "100 minutes pour convaincre" sur France 2, Nicolas Sarkozy a mis en avant le concept de discrimination positive fondée sur la religion en parlant de "hauts fonctionnaires musulmans" et de "préfet musulman".

Dans son livre publié en 2004 (La République, les religions, l'espérance, Cerf), la discrimination positive n'est plus fondée sur la religion mais sur l'origine : "Dans une République, les droits des citoyens ne sauraient varier en fonction de l'ancienneté de l'installation. En période de rattrapage, il peut y avoir des aménagements".

Le 13 février 2006, sur RMC, le ministre de l'intérieur répond positivement à la question de savoir s'il convient de "faire apparaître l'origine ethnique des délinquants dans les statistiques de la police". Dans son livre publié en 2006 (Témoignage, XO Éditions), il regrette également que "nos statistiques ne connaissent que deux catégories de personnes : les françaises et les étrangères" et qu'il soit "interdit en France de calculer le nombre de Français d'origine maghrébine, d'origine turque, d'origine chinoise, le nombre de Français noirs". Dans le même ouvrage, Nicolas Sarkozy explique qu'il a voulu appliquer la discrimination positive en souhaitant "la nomination d'un préfet musulman, et, plus tard, de personnes issues de l'immigration ou originaires d'outre-mer pour les préfets à l'égalité des chances dont les postes ont été créés après la crise des banlieues à l'automne 2005".

Dans Le Parisien du 20 octobre 2006, la discrimination positive n'est ainsi plus fondée ni sur la religion ni sur l'origine mais sur la couleur de la peau : "Les administrations sont obligées par la loi d'avoir 6% de leurs collaborateurs avec un handicap. Qu'est-ce que c'est, sinon un quota ? J'aimerais qu'on me dise pourquoi il serait normal de faire de la discrimination positive pour les femmes ou les handicapés, et pourquoi ce serait anormal pour les compatriotes de couleur".

1. 2. Parallèlement, le même Nicolas Sarkozy se contredit :

"La tentation du communautarisme menace d’enfermer chacun dans ses origines, sa religion et sa couleur de peau" (Agen, 22 juin 2006)

"Je refuse le communautarisme qui réduit l'homme à sa seule identité visible" (Paris, 14 janvier 2007)

 

2. Relations transatlantiques

2. 1. Dans le contexte de sa visite aux États-Unis (entretien dans Le Monde daté du 11 septembre 2006, discours du 12 septembre 2006 à Washington, entretien dans la revue Le Meilleur des Mondes), Nicolas Sarkozy a remis en cause la position de la France au Conseil de sécurité de l'ONU lors de la crise irakienne, en 2003. Le reproche de "la menace de l'utilisation de notre droit de veto" était déjà présente dans le livre publié en 2006 par "Sarkozy l'Américain" (l'expression est du spécialiste des relations internationales Dominique Moïsi).

2. 2. Dans le contexte de sa campagne électorale, le même Nicolas Sarkozy a rendu "hommage à Jacques Chirac, qui a fait honneur à la France quand il s’est opposé à la guerre en Irak, qui était une faute".

 

3. Institutions

3. 1. Lors de ses vœux à la presse du 12 janvier 2006 puis lors de la convention de l'UMP sur les institutions (5 avril 2006), Nicolas Sarkozy a souhaité une importante révision constitutionnelle afin que ce soit le président de la République, et non plus le premier ministre, qui détermine et conduise la politique de la Nation. Raillant ensuite, à l'occasion des forums de l'UMP, la conception gaulliste de la fonction présidentielle ("le président de la République n'est pas un arbitre au-dessus des partis, qui marche sur les eaux parce qu'il a été élu").

3. 2. Lors de son disours d'entrée en campagne, le même Nicolas Sarkozy tranche la question institutionnelle dans un sens opposé : "Notre démocratie n’a pas besoin d'une nouvelle révolution constitutionnelle. On change trop notre Constitution. Il faut arrêter de dire qu'elle est bonne et proposer tous les trimestres une nouvelle modification.*"

 

* allusion aux trois révisions constitutionnelles programmées par Jacques Chirac avant l'élection présidentielle

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