"Mariage pour tous", AMP, PMA et GPA: amalgames et confusions (02 février 2013)
Alors que la discussion parlementaire autour de la loi ouvrant le mariage civil aux couples de même sexe a débuté, ce n'était pas mon intention de revenir ici sur ce débat. Il me semble pourtant utile de soulever deux questions.
1. Assistance médicale à la procréation (AMP) = Procréation médicalement assistée (PMA)?
Trop souvent dans le débat, les deux termes d'Assistance médicale à la procréation (AMP) et de Procréation médicalement assistée (PMA) sont utilisés comme des synonymes, ouvrant la voie à de très nombreuses confusions.
L'Assistance médicale à la procréation (AMP) a légalement pour objet de remédier à l'infertilité pathologique d'un couple (1). Elle est ouverte aux couples hétérosexuels si et seulement si l'homme et la femme formant le couple sont en âge de procréer (article L2141-2 du Code de la santé publique).
L'AMP ne pourra donc jamais concerner un couple homosexuel, même au nom de l'"égalité des droits", puisque l'incapacité d'avoir des enfants d'un couple homosexuel n'est pas pathologique mais liée à la biologie, à la nature sexuée de la reproduction humaine.
La Procréation médicalement assistée (PMA) aurait pour objet de créer un nouveau mode de reproduction afin de dépasser la biologie humaine. La PMA pourrait aussi bien concerner les couples hétérosexuels qui ne sont plus en âge de procréer que les couples homosexuels ou les femmes célibataires.
La PMA soulèverait un vrai problème éthique qui mériterait une réflexion approfondie et éclairée (conformément à l'article L1412-1-1 du Code de santé publique), mais qui n'a en toute hypothèse rien à voir avec l'actuelle AMP (2).
2. Mariage et adoption homosexuels = Procréation médicalement assistée (PMA) = Gestation pour autrui (GPA)?
Une partie des partisans de la loi ouvrant le mariage et l'adoption aux couples de même sexe (dont le rapporteur PS Erwann Binet) sont non seulement pour cette loi mais également pour la légalisation de la Procréation médicalement assistée (PMA).
Deux réflexions:
- la PMA renvoie à l'idée - que je combats - d'un "droit à l'enfant".
- la PMA ne peut biologiquement permettre qu'à des couples de femmes homosexuelles d'avoir un enfant; puisqu'il s'agirait alors de créer un "droit à l'enfant", il faudrait donc conférer ce même "droit" aux couples d'hommes homosexuels, ce qui ouvrirait de fait la voie à la Gestation pour autrui (GPA), que je combats fermement au nom des droits de l'Homme et du principe de l'indisponibilité du corps humain.
Ceci posé, cela ne signifie en rien que la loi ouvrant le mariage et l'adoption aux couples homosexuels conduirait forcément à la PMA:
- les deux textes de loi ne sont juridiquement pas liés (le contenu du futur projet de loi sur la famille n'est d'ailleurs même pas encore connu).
- on peut en cohérence être favorable à l'ouverture du mariage et de l'adoption aux couples de même sexe au nom de l'intérêt supérieur des enfants existants, tout en combattant le supposé "droit à l'enfant", ainsi que la PMA et le GPA qui vont avec.
- si la PMA était malheureusement adoptée à l'occasion du futur projet de loi sur la famille, ce ne serait bien entendu pas en raison de l'adoption antérieure d'une loi ouvrant le mariage et l'adoption aux couples de même sexe, mais tout simplement parce qu'une majorité se dégagerait alors sur cette seule et unique question au Parlement.
(1) "ou risque de transmission à l'enfant ou à un membre du couple d'une maladie d'une particulière gravité".
(2) Ainsi "l'assistance médicale à la procréation n'a pas eu pour objet de créer un modèle alternatif à la procréation: la fonction "naturelle" de la procréation est le modèle sur lequel l'assistance médicale à la procréation a été calquée, autant que faire se peut. D'ailleurs, si la loi régit cette pratique, c'est parce que des médecins interviennent dans le processus procréatif, ce que sa dénomination traduit: ce n'est pas la procréation (procréation médicalement assistée) qui est régie, mais seulement l'activité médicale (assistance médicale à la procréation)." Source: http://www.ladocumentationfrancaise.fr/var/storage/rappor...
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Commentaires
"la PMA ne peut biologiquement permettre qu'à des couples de femmes homosexuelles d'avoir un enfant; puisqu'il s'agirait alors de créer un "droit à l'enfant", il faudrait donc conférer ce même "droit" aux couples d'hommes homosexuels, ce qui ouvrirait de fait la voie à la Gestation pour autrui (GPA), que je combats fermement au nom des droits de l'Homme et du principe de l'indisponibilité du corps humain."
=> Objection : on peut tout à fait être favorable au "droit à l'enfant" dans certaines conditions éthiques permises par la PMA mais pas par la GPA.
Écrit par : Kévin | 03 février 2013
Merci pour ces explications parfaitement claires ! Les différents concepts n'ont peut-être pas encore été bien assimilés par certains députés ? D'où leurs propositions inadaptées et leurs réactions enflammées...
Écrit par : Françoise Boulanger | 03 février 2013
Je vous conseille la derniere etude de l'Institut Thomas More qui montre que dans tous les pays qui ont adopte le mariage gay, la question de la PMA voire de la GPA se sont tres vite posees. Il y a une logique intelectuelle, c'est dans le sens de "l'histoire" des entrepreneurs communautaristes. Si on avait voulu l'eviter, on se serait contente de reviser le PACS. Le mariage a un tout autre sens lie a la creation d'une famille.
Écrit par : max | 03 février 2013
Parfaitement d'accord avec votre analyse. On peut ajouter que ni la PMA, ni la GPA ne sont mentionnés dans l'engagement 31 de François hollande : "j'ouvrirai le droit au mariage et à l.adption aux couples homosexuels". On peut contester que le vote en faveur de François hollande signifiait que tous ses électeurs étaient d'accord avec cet engagement, on ne peut être surpris de sa volonté de le mettre en œuvre. Mais soutenir qu'il s'est publiquement engagé avant son élection en faveur de l'extension de la PMA, et de la suppression de l'interdiction de la GPA, relève de la désinformation, ou plus précisément du mensonge.
Écrit par : Pierre boncourt | 04 février 2013
Intéressant l'explication sur la différence entre PMA et AMP, la dernière étant pleinement justifiée médicalement, sans besoin d'une nouvelle conception de la procréation.
Et la GPA ouvre le champ à des pratiques douteuses sur le plan éthique. Le Gouvernement actuel a t il senti enfin le risque de surenchère 'infernale' vers des dérives de l'utilisation du corps humain en évoquant un futur avis du Conseil national d'Ethique ? Ou est ce pour se donner du temps et jouer sur l'affaiblissement de l'opposition des Français de plus en plus nombreux à se méfier ou refuser des bouleversements sociétaux qui mettent à bas les fondements familiaux de notre Société occidentale ?
Une minorité qui impose son diktat à une majorité en détournant le sens des mots (liberté égalité ) et des concepts, cela s'est souvent vu dans l'Histoire et je redoute les dégâts dans une Société française qui a déjà de grandes difficultés à reconnaître ses propres valeurs , en coexistant concurremment avec des Cultures non européennes fortes et revendicatrices qui vivent actuellement en son sein.
Écrit par : Laure 74 | 04 février 2013
Ca ne vous dérange pas d'écrire n'importe quoi ?
AMP et PMA sont équivalentes.
Voir ici :
http://www.dictionnaire-juridique.com/definition/procreation-medicalement-assistee-pma.php
Le fait que des célibataires hétérosexuelles ou des couples d'homosexuelles aient accès à ces techniques d'assistance médicale ne pose aucune question d'ordre éthique. C'est une simple discrimination que de leur refuser l'extension de ce droit à toutes les femmes.
Demande t-on à une femme non stérile de changer d'homme parce que son couple a des difficultés à procréer ? Non. On entend le projet parental du couple et on l'aide.
Refuser à des lesbiennes le droit d'accéder à ces techniques, c'est nier leur existence en tant que "couple" juridique et social et nier le désir d'enfant de ces femmes, c'est leur interdire purement et simplement d'avoir un enfant. C'est en plus hypocrisie et une discrimination par l'argent, puisque celles qui en ont les moyens accèdent à ces techniques ailleurs.
Écrit par : assez | 07 février 2013
Merci pour cet aimable commentaire.
Vous me renvoyez à un "dictionnaire juridique" écrit par deux particuliers, qui plus est à une entrée (Procréation médicalement assistée) qui n'existe juridiquement pas! Quelle crédibilité!
Je vous renvoie, moi:
1. Au Code de la santé publique: "L'assistance médicale à la procréation s'entend des pratiques cliniques et biologiques permettant la conception in vitro, la conservation des gamètes, des tissus germinaux et des embryons, le transfert d'embryons et l'insémination artificielle" (article L2141-1).
2. Au rapport du Conseil d'État sur la révision des lois de bioéthique: "...l'assistance médicale à la procréation n'a pas eu pour objet de créer un modèle alternatif à la procréation: la fonction "naturelle" de la procréation est le modèle sur lequel l'assistance médicale à la procréation a été calquée, autant que faire se peut. D'ailleurs, si la loi régit cette pratique, c'est parce que des médecins interviennent dans le processus procréatif, ce que sa dénomination traduit: ce n'est pas la procréation (procréation médicalement assistée) qui est régie, mais seulement l'activité médicale (assistance médicale à la procréation)."
3. À votre raison: vous avez raison - et c'est précisément ce que je dénonce - les deux termes sont en effet utilisés comme synonymes, mais ils relèvent pourtant de deux actes philosophiquement différents:
- AMP: réponse médicale à l'infertilité d'un couple qui devrait normalement pouvoir procréer.
- PMA: permettre la procréation à des personnes qui ne peuvent naturellement pas ou plus procréer (personne célibataire, couple de personnes de même sexe, couple de personnes de sexe différent qui ne sont plus en âge de procréer).
Sur le fond: vous écrivez n'importe quoi, précisément par ce que vous refusez d'établir cette distinction pourtant fondamentale et rationnelle entre AMP et PMA.
Écrit par : Laurent de Boissieu | 07 février 2013