Désobéissance civique (22 octobre 2009)
Je ne suis pas prof d'Histoire (mais j'aurais pu l'être, d'ailleurs ma vocation initiale était plus la recherche et l'enseignement que le journalisme). Mais si j'avais été prof d'Histoire, je n'aurais pas lu la lettre de Guy Môquet à mes élèves. Lettre touchante, certes, d'un jeune homme condamné à sa mère, mais lettre sans aucune portée historique d'un faux Résistant. Bien entendu, à la Libération il fallait symboliser l'unité nationale, des gaullistes aux communistes, et le fils de Prosper Môquet, lié au général de Gaulle depuis Alger, était un symbole tout trouvé. La Révolution avait son Joseph Bara; la Résistance aurait son Guy Môquet.
Non, si j'avais été prof d'Histoire j'aurais lu, sur les conseils de M. Naegelen, ministre de l'Éducation nationale en septembre 1947, les lettres écrites quelques heures avant leur exécution par cinq élèves du Lycée Buffon de Paris qui, entrés - eux - dans la Résistance active, furent arrêtés et fusillés par les Allemands le 8 février 1943 au Mont Valérien.
Les voici :
Lettre de Lucien Legros (1924-1943)
Lettres de Pierre Grelot (1923-1943)
Lettre de Pierre Benoît (1925-1943)
Lettre de Jacques Baudry (1922-1943)
Lettre de Jean Arthus (1925-19432)
Honneur et Patrie
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Commentaires
Et, juste comme ça, pour voir, qu'est-ce qui empêcherait un prof d'Histoire, aujourd'hui, de faire les deux ? Je n'ai jamais compris ceux qui croient que cette lecture doit être exclusive.
Écrit par : koz | 22 octobre 2009
Et, juste comme ça, pour voir, qu'est-ce qui empêcherait un prof d'Histoire, aujourd'hui, de faire les deux ? Je n'ai jamais compris ceux qui croient que cette lecture doit être exclusive.
Écrit par : koz | 22 octobre 2009
Habituellement, je n'écris qu'une seule fois le même commentaire. Désolé.
Écrit par : koz | 22 octobre 2009
Strictement rien !
Strictement rien !
Mais je ne vois pas l'intérêt de lire une lettre sans portée historique d'un faux résistant qui lors de son arrestation renvoyait dos-à-dos les États capitalistes et l'Allemagne hitlérienne (Guy Môquet).
Mais je ne vois pas l'intérêt de lire une lettre sans portée historique d'un faux résistant qui lors de son arrestation renvoyait dos-à-dos les États capitalistes et l'Allemagne hitlérienne (Guy Môquet).
Écrit par : Laurent de Boissieu | 22 octobre 2009
Laurent
Je ne suis pas d'accord avec toi pour distribuer ou non à Guy Mocquet un brevet de résistance. Certes, il n'a fait que distribuer des tracts mais à l'époque c'était une activité dangereuse. S'il avait vécu ou échappé à l'occupant qu'aurait-il fait? Nul ne pouvait le savoir.
En revanche, la lecture de cette lettre est stupide, non parce qu'il ne faut pas rappeler cette part de la mémoire natioanle mais parce que l'ordre de Nicolas Sarkozy va à l'encontre de toute logique pédagogique. Imaginez le cours d'un enseignants. "Bien nous interrompons, à présent notre cours sur les Romains pour lire la lettre de Guy Mocquet"...
Lire la lettre sans la replacer dans son contexte, c'est à dire sans la placer pendant le cours qui se déroule normalement en 3e ou en terminale, n'a aucun sens et risque de ne pas être compris par la plupart des enfants qui l'entendront.
Y avait-il d'autres textes issus de la résistance autrement plus parlant et important? Oui et chacun de ces textes (appel du 18 juin, préambule de la constitution de 1946, poèmes d'Aragon, Eluard, ..., texte de Vercors).
Sarkozy a choisi l'émotionnel, qu'on se rappelle ce que la lecture de cette lettre nous a coûté pendant la coupe du monde de rugby.
Écrit par : Nicolas Bonin | 23 octobre 2009
Personnellement, je préfère la lettre d'Hélie de St Marc à un jeune de 20 ans ... il y a une intensité et une spiritualité qui dépassent la seule émotion.
Écrit par : Griffon Lyonnais | 23 octobre 2009
Nicolas,
Pour une fois nous voilà en désaccord ! Distribuer des tracts contre l'occupant est en effet un acte de Résistance. Distribuer des tracts renvoyant dos-à-dos l'occupant et les alliés n'est, en revanche, pas un acte de Résistance, désolé...
Pour le reste, tu n'as pas tort, mais - même si on peut discuter des modalités - l'idée est de faire un devoir de mémoire civique et non un cours d'Histoire.
Sans aucune portée historique, la lettre de Guy Môquet a été choisie par Nicolas Sarkozy uniquement parce qu'elle le fait chialer : et là il y a un problème à vouloir transformer une émotion personnelle en une émotion collective.
Écrit par : Laurent de Boissieu | 23 octobre 2009
Je ne sais si cette lecture devra se faire uniquement en cours d'histoire dorénavant, mais en tous cas à la rentrée précédente, nous y avions eu droit en cours de mathématiques (le professeur l'avait même ponctuée d'un "ça c'est fait, on repasse aux choses utiles" de bon aloi), et là, c'est carrément du hors-sujet.
Écrit par : Brath-z | 23 octobre 2009
Présenté comme cela, c'est effectivement n'importe quoi !!!
Écrit par : Laurent de Boissieu | 23 octobre 2009
Sinon, cette histoire de Guy Môquet résistant ou non me rappelle une controverse au sein du PCF sur le sens à donner à l'appel de Maurice Thorez et Jacques Duclos du 10 juillet 1940. S'agissait-il d'un texte engageant à résister contre l'occupant parce qu'occupant ou bien à combattre l'Allemagne parce que nazie ? J'ai eu l'impression à sa lecture que la première raison est la bonne, mais cela donne un air "nationaliste" et "indulgent envers le nazisme" qui déplaît - ce que je peux comprendre - à beaucoup.
Pour moi, l'appel Thorez-Duclos est un texte qui enjoint à la défense nationale, et Guy Môquet n'est nullement un résistant ni à l'occupation ni au nazisme (je rappelle qu'il y eu des fascistes dans la résistance et des républicains dans la collaboration, on ne peut pas expliquer la résistance ni la collaboration par le seul vecteur idéologique).
Écrit par : Brath-z | 23 octobre 2009
J'enfonce juste le clou en passant : oui, il y a eu beaucoup de personnes très nationalistes (voire d'ex-fascistes) dans la Résistance. Voire notamment toute la filière cagoularde dont les membres prenaient souvent comme pseudo de Résistance des noms de station de métro, ainsi que de nombreux maurassiens.
Il y a eu également, dans la collaboration, beaucoup de républicains (voir par exemple la collaboration "républicaine" de la Ligue de la pensée française, qui comprenaient plein d'anciens instituteurs, intellos ou hommes politiques radicaux, socialistes, syndicalistes, franc-maçons et même des anciens du comité de vigilance des intellectuels antifascistes !), de socialistes (la majorité, avec les radicaux-socialistes, des membres du RNP), de communistes (au POPF et au PPF surtout).
Il y en avait peu de gens de gauche dans le Vichy maurassien de la Révolution nationale (1940-1941), mais plein parmi les collaborateurs parisiens (PPF,RNP, etc.). Ils sont progressivement entrés à Vichy à partir du retour de Laval (avril 1942 de mémoire).
A la louche, d'après mes stats perso :
- il y avait au total plus de la moitié de gens de gauche parmi les partis collabos (à cause du poids du RNP et du PPF) et environ 1/3 à Vichy (ou un peu moins d'1/3).
- il y avait un peu plus de gens de droite que de gauche dans la Résistance avant juin 1941 (entrée de l'URSS dans la guerre) (ceci d'après le dépouillement de tous les premiers réseaux de Résistance cité dans la somme de référence : Histoire de la Résistance en France, d'Henri Noguères).
Écrit par : Libéral européen | 26 octobre 2009