Vers une France des baronnies (07 octobre 2009)
"Le débat statutaire est terminé en Corse, cette question est désormais tranchée", avait déclaré Nicolas Sarkozy, le 6 juillet 2003, après le "non" des électeurs corses à son projet de collectivité territoriale unique.
Si le débat a été tranché en Corse, il ne l'est apparemment pas en Guyane et en Martinique, où une consultation locale (principe déjà choquant en soi : une telle décision devrait concerner la nation dans son ensemble) sur le passage au régime de spécialité législative et d'autonomie (article 74 de la Constitution) aura finalement lieu le 17 janvier 2010.
Les électeurs de Martinique et de Guadeloupe, régis comme la Guyane par le statut antirépublicain de 2003 (reconnaissance des "populations d'outre-mer" - après avoir échappé en 1991 à celle du "peuple corse" - et régime de l'identité législative de l'article 73 de la Constitution) ont pourtant déjà également dit "non" à la création d'une collectivité unique, le 7 décembre 2003...
Autant on pourrait imaginer pour les conseillers généraux et les conseillers régionaux des DROM un mode de scrutin comparable à celui des conseillers d'arrondissements et des conseillers de Paris, autant tout ce qui va dans le sens d'un statut d'exception ne pourra que renforcer les baronnies politiques ou financières qui pourront ainsi cuire leur petite soupe dans leur petit coin sur le dos de nos concitoyens des territoires concernés.
Bref, il s'agit d'une contre-réforme politique aux antipodes de la révolution économique et sociale dont ont besoin la Guadeloupe, la Guyane et la Martinique.
N.B.: le processus sera le suivant
1) consultation le 17 janvier sur le passage au régime de l'article 74 de la Constitution (spécialité législative et autonomie)
2) en cas de victoire du "non", seconde consultation le 24 janvier sur la création d'une collectivité unique (sous le régime actuel de l'article 73)
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Commentaires
« La France, une et indivisible… » Je connais le principe.
Mais j’ai du mal à l’intégrer concernant les DOM-TOM.
Que la Guyane, la Guadeloupe, Martinique et autres soient la France, franchement, j’ai du mal.
Je comprends bien l’intérêt stratégique de ces territoires (encore que…) mais vu ce qu’il coûtent à la métropole, je me demande si il ne serait pas plus profitable pour tout le monde de s’en séparer.
La Guadeloupe est assez révélatrice. Le début d’année a été marqué par de fortes tensions et un climat presque insurrectionnel….pour les raisons que l’on sait.
Lorsque le président Sarkozy s’est rendu en Martinique, il a annoncé qu’il y aurait une consultation sur l’autonomie, réclamée depuis longtemps par les élus de l’île.
Peu après, il a été obligé de faire une déclaration en précisant que cette consultation ne concernait QUE la Martinique et en aucun cas la Guadeloupe pour laquelle il n’était pas question d’autonomie, encore moins d’indépendance.
Pourquoi a-t-il du faire cette précision en urgence ? A écouter Eli Domota, la France aurait mis la Guadeloupe en coupe réglée et ses habitants limite rendus au temps de l’esclavage. Au point que l’indépendance ou au minimum l’autonomie pourrait être accueillis comme une libération.
Or, la Guadeloupe, dans son ensemble, qui crie haut et fort qu’elle est honteusement exploitée, n’à qu’une peur, c’est de voir s’évaporer la manne métropolitaine.
Avec 140 milliards de déficit, il serait peut être temps de se poser la question de l’opportunité de continuer à déverser des milliards dans un puit sans fonds.
Je ne parle même pas de la Guyane et de ses frontières passoire, ou de Mayotte où il fut même un temps question de suspendre le droit du sol (je ne sais pas ce qu’il en est finalement) une spécificité géographique et donc une entorse à l’unité nationale qui a sans nul doute du vous faire bondir.
Je ne comprends pas pourquoi on s’entête à conserver ces îles.
Écrit par : flo1966 | 08 octobre 2009
Flo, le fond de ta question constitue un joli sujet de Sciences-Po : "qu'est-ce qu'une nation ?"
Si c'est l'histoire du territoire, alors ils sont sans doute françajs car il font partie du royaume puis de la République depuis environ 300-400 ans (à la louche), tout comme Lille ou Strasbourg, et plus que Nice et Chambéry.
Si c'est la "volonté de vivre ensemble", alors il faut effectivement un référendum. Et encore, sur un sujet aussi crucial, je ne sais si une seule consultation suffit.
Le maintien de ces territoires rappelle que la France eu des colonie et pratiqua l'esclave. On peut le vivre comme une honte, une séquelle ou une douleur. Mais il incarne également en soi une vision politique originale : celui du modèle, rare sur le globe, d'une nation transcontinentale, avec tout ce que celà induit de différences ethniques (au passage : ethnique veut dire culturel), économiques, etc. réunies en une seule nation égalitaire. Un beau défi aux différentialistes et déterministes de tous poils.
Mais Laurent aura sûrement une réponse plus construite sur ce terrain qui lui tient à coeur.
Écrit par : Libéral européen | 09 octobre 2009
Je trouve décidément scandaleux cette pratique visant à recommencer des référendums à chaque fois que les électeures ne vont pas vers le "désir" des politiques (dom-tom, Irlande, etc) !... N'oublions pas que les Matiniquais et Guadeloupéens avaient déjà été consulté en 2003 au sujet d'un projet visant à plus "d'autonomie". Or, les électeurs n'ont pas été dupes. Ils se sont rendus compte qu'à terme, il s'agirait de l'indépendance. Certains politiques veulent manifestement se débarasser des DOM et TOM.
Écrit par : L'indépendant | 11 octobre 2009