14 avril 2007
Plus d'un tiers des Français seraient incités à voter sur un critère non politique
Éclairage
C'est une chose entendue : un président de la République est élu sur ses convictions politiques et non pas sur son sexe, son origine, sa religion ou sa vie privée. Les sondages montrent cependant que ces préjugés extra-politiques ont encore la vie dure.
Le préjugé sexiste concerne 37% des Français : 16% souhaiteraient que le prochain président de la République soit plutôt un homme, 21% plutôt une femme.
Le préjugé xénophobe ou, à l'inverse, xénophile, est moins fort (27%) : le fait qu'un candidat soit issu de l'immigration inciterait 23% des personnes interrogées à ne pas voter pour lui et, au contraire, 4% à voter pour lui.
La spiritualité est à peine plus un critère de vote, mais avec des différences en fonction des croyances (islam : 38%; judaïsme : 14%; catholicisme ou "sans religion" : 12%). Elle inciterait ainsi 38% des Français à ne pas voter pour un musulman, 13% à ne pas voter pour un juif et 5% à ne pas voter pour une personne sans religion. À l'inverse, elle inciterait 10% à voter en faveur d'un catholique et 7% en faveur d'une personne sans religion.
Finalement, la vie privée est le critère le moins prégnant. Qu'il s'agisse de l'homosexualité (inciterait 22% à ne pas voter pour un candidat), du fait d'avoir des enfants (inciterait 14% à voter pour lui) ou d'être marié (inciterait 10% à voter pour lui).
Laurent de Boissieu
© La Croix, 13/04/2007
Source : sondage Sofres du 24 au 25 janvier 2006 pour Le Figaro
Ajout du 15/04/2007 : "Je voudrais m'adresser aux femmes : j'ai besoin du vote des femmes", a déclaré, dimanche, Ségolène Royal. Voilà ce qui s'appelle atteindre le degré zéro de la politique !
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12 avril 2007
vote électronique
Éclairage
Plus d'un million et demi d'électeurs, inscrits dans 82 communes, utiliseront le vote électronique à l'élection présidentielle. Depuis 1969, les machines à voter sont autorisées dans les bureaux de vote des communes de plus de 3 500 habitants figurant sur une liste fixée par décret en conseil d'État (article L. 57-1 du code électoral). Le vote électronique s'est progressivement développé depuis la publication au Journal officiel, en novembre 2003, d'un arrêté "portant approbation du règlement technique fixant les conditions d'agrément des machines à voter". Lors du référendum du 29 mai 2005, 55 communes s'étaient équipées d'urnes électroniques. Trois modèles sont agréés par le ministère de l'intérieur : Nedap (néerlandais, 80% du marché), Indra (espagnol, 12%) et iVotronic (américain, 8%).
Le vote électronique ne doit pas être confondu avec le vote en ligne, par Internet, qui est une forme de vote à distance. Or ce dernier n'est plus autorisé pour les élections politiques depuis la loi du 31 décembre 1975. Il a uniquement été autorisé par la loi du 28 mars 2003 pour l'élection des membres de l'Assemblée des Français de l'étranger.
Même si le code électoral assimile vote blanc et vote nul, regroupés dans l'ensemble des suffrages non exprimés, les machines à voter doivent notamment "permettre l'enregistrement d'un vote blanc". Contrairement à leurs concitoyens qui voteront dans une urne papier transparente, ceux qui voteront avec une urne électronique auront donc la possibilité de voter blanc au même titre que pour un des douze candidats en lice à la présidentielle.
Le vote électronique est toutefois controversé. Ses adversaires estiment qu'il remet en cause la régularité des opérations électorales (secret du vote, transparence...) et qu'étant adopté au cas par cas, il rompt l'égalité entre les citoyens.
Laurent de Boissieu
© La Croix, 11/04/2007
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vote papier
Électeur dans une commune ayant malheureusement adopté le vote électronique (Courbevoie, dans les Hauts-de-Seine), j'ai signé la pétition pour le maintien du vote papier, pour au moins quatre raisons :
- attachement au dépouillement citoyen
- régularité et transparence des opérations électorales
- secret du vote
- égalité entre les citoyens
Je vous invite également à signer cette pétitition !
http://www.ordinateurs-de-vote.org
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03 avril 2007
clivage droite gauche
"Deux grands axes idéologiques permettent aujourd'hui de définir les notions de droite et de gauche", explique Étienne Schweisguth dans l'Atlas électoral 2007 que viennent de publier les Presses de Sciences-Po (1). "Celui des problèmes économiques et sociaux et celui des questions de société. Sur chacun de ces grands axes, on a assisté à un important mouvement de convergence idéologique entre les grands partis de gauche et de droite."
En matière économique, le PS prônait, avant l'alternance de mai 1981, une "rupture avec le capitalisme". Mais, depuis le "tournant de la rigueur" (mars 1983), la gauche de gouvernement s'est ralliée à l'économie de marché. Selon une étude de la Sofres pour la Fondation Jean-Jaurès et Le Nouvel Observateur (2), cette réorientation idéologique a contribué à brouiller le clivage droite-gauche. En 1981, 57% des personnes interrogées et ayant une opinion estiment que "les notions de droite et de gauche sont toujours valables pour comprendre les prises de position des partis et des hommes politiques". En 1984, 57% d'entre eux répondent, à l'inverse, que "les notions de droite et de gauche sont dépassées". Ce chiffre culmine à 65% en 2002, après la troisième cohabitation. Aujourd'hui, 56% des personnes interrogées affirment toujours que "les notions de droite et de gauche sont dépassées".
Le ralliement, dans la pratique, de la gauche de gouvernement à l'économie de marché ne s'est toutefois pas complètement traduit dans le discours des dirigeants du PS, dont certains, comme l'a montré le débat référendaire sur la Constitution européenne, se disent toujours antilibéraux. Paradoxalement, la droite n'hésite pas non plus, par éclipse, à tenir un discours antilibéral. En 1995, ce fut le cas de Jacques Chirac avec la thématique de la "fracture sociale". Aujourd'hui, c'est le cas de Nicolas Sarkozy lorsqu'il vante les "droits opposables".
"La gauche accepte le capitalisme, mais l'économie reste un clivage entre la gauche et la droite", nuance Xavier Jardin, chargé d'enseignement en science politique à l'IEP de Paris et à l'Université catholique de l'Ouest (Angers). L'enquête de la Sofres montre ainsi des écarts importants entre sympathisants de droite et de gauche dans ce domaine. La généralisation des 35 heures aux petites entreprises est ainsi approuvée par 55% des sympathisants de gauche et seulement 25% de ceux de droite. A contrario, l'assouplissement du code du travail est voulu par 58% des sympathisants de droite, mais par seulement 35% de ceux de gauche. Tandis que l'instauration d'un service minimum garanti lors des grèves est davantage soutenue à droite (93%) qu'à gauche (67%).
Le même phénomène se retrouve en matière de libéralisme culturel. Mais, cette fois, "c'est la droite, hier garante de la tradition, qui s'est rapprochée de la gauche, s'adaptant en cela au changement des valeurs qu'a connu la société française depuis 1968", analyse Étienne Schweisguth. Entre 1981 et 1999 (3), le pourcentage de sympathisants de droite jugeant que "le divorce est justifiable" est ainsi passé de 36% à 53% (56% à 62% chez les sympathisants de gauche).
Rapprochement ne signifie toutefois pas, là non plus, alignement. Selon le sondage de la Sofres, les sympathisants de gauche approuvent aujourd'hui majoritairement le mariage entre homosexuels (55%), contrairement à leurs compatriotes de droite (35%). Et l'adoption des enfants par les couples homosexuels recueille moins d'opinions favorables à droite (26%) qu'à gauche (44%).
Sur d'autres questions de société, en revanche, c'est la gauche qui semble s'être rapprochée de la droite. Entre 1981 et 1999, le pourcentage de sympathisants de gauche estimant qu'"il faudrait respecter davantage l'autorité" est passé de 38% à 57% (72% à 81% chez les sympathisants de droite). Une remise en cause de l'héritage libertaire de Mai 68 amorcée à gauche par Jean-Pierre Chevènement et poursuivie par Ségolène Royal.
Ce qui fait dire à Xavier Jardin que, dans cette campagne présidentielle, "le discours politique est saturé de thématiques droitières comme l'autorité ou l'identité nationale". L'universitaire refuse toutefois de parler de "droitisation", affirmant plutôt que "Ségolène Royal copie la triangulation politique opérée par Bill Clinton et Tony Blair, qui consiste à s'approprier des thématiques de droite mais en y mettant un sens de gauche".
Une telle stratégie peut toutefois s'avérer électoralement périlleuse en France, où les extrêmes sont forts. "Peut-on, lorsqu'on est de gauche, se saisir de thématiques de droite sans faire fuir les électeurs de gauche vers l'extrême gauche ?", s'interroge Xavier Jardin. Quoi qu'il en soit, le sondage de la Sofres révèle que la création de centres éducatifs renforcés pour les mineurs délinquants, "si besoin avec un encadrement militaire", est soutenue à gauche (67% d'opinions favorables) comme à droite (80%).
Nicolas Sarkozy ne reçoit en revanche pas le même soutien de son électorat sur sa proposition (qu'il n'a finalement pas retenue dans son projet présidentiel) d'accorder le droit de vote aux étrangers non ressortissants de l'Union européenne pour les élections locales, idée reprise de la gauche : 44% seulement des sympathisants de droite y sont favorables, contre 68% de ceux de gauche...
Laurent de Boissieu
© La Croix, 02/04/2007
(1) Atlas électoral 2007, Presses de Sciences-Po, 140 pages, 19 euros
(2) Sondage réalisé du 7 au 8 mars 2007 auprès d'un échantillon représentatif de 1 000 personnes
(3) Source : Atlas électoral 2007
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09 mars 2007
une majorité PS-UDF ?
Je reprends ici les idées développées dans une précédente note, que je complète.
L'hypothèse d'une majorité formée par l'UDF et une partie du PS semble invraisemblable en raison de l'actuelle structuration du paysage politique français. Mais, si on s'intéresse aux idées et non plus aux structures partisanes, cette hypothèse semble tout à fait possible.
Dans la plupart de nos voisins européens, le clivage droite-gauche est une question de degré de libéralisme, avec une droite libérale-conservatrice et une gauche social-libérale. Les acteurs politiques rejetant le capitalisme libéral étant disqualifiés à l'extrême gauche (cf. en Allemagne le départ d'Oskar Lafontaine du SPD). Cette situation est notamment une conséquence, dans le contexte de la construction européenne, de l'évolution idéologique des partis sociaux-démocrates (ou travaillistes) vers un social-libéralisme.
En France, le terme social-libéralisme est toutefois utilisé négativement pour se démarquer au sein de la gauche (le PCF dénonçant le social-libéralisme du PS) ou au sein du PS (Jean-Luc Mélenchon dénonçant le social-libéralisme de Dominique Strauss-Kahn). Le PS français étant, contrairement à ses partenaires européens, pour moitié environ (le clivage apparu lors des débats sur la Constitution européenne est révélateur à ce sujet) composé de militants qui rejettent la capitalisme libéral.
Sans utiliser le mot (même Jean-Marie Bockel se réclame d'un "socialisme libéral" et non du "social-libéralisme"), une partie du PS est pourtant sur la même ligne idéologique que la gauche social-libérale dite "gauche réformiste". Il suffit par exemple de regarder les participants français aux cercles de réflexion qui s'y rattachent :
- Policy Network, qui s'inspire du Britannique Tony Blair (partisan d'une "troisième voie" entre social-démocratie et libéralisme), de l'Allemand Gerhard Schröder (promoteur d'un "nouveau centre") et, outre-Atlantique, du Parti démocrate : Alain Minc, Dominique Strauss-Kahn, Patrick Weil, Jean Pisani-Ferry, Marisol Touraine, Olivier Ferrand
- Gauche Réformiste Européenne (GRE), association belge : Olivier Ferrand, Gilles Finchelstein, Élisabeth Guigou, Pascal Lamy, Pierre Moscovici, Dominique Strauss-Kahn
- À Gauche En Europe (AG2E), association française : Michel Rocard, Dominique Strauss-Kahn, Pierre Moscovici, Marisol Touraine, Olivier Ferrand...
Idéologiquement, cette gauche réformiste est plus proche de l'UDF et de François Bayrou que de l'aile gauche du PS ou des partis situés à la gauche du PS (PCF, MRC, LCR...). Dans cette perspective, l'entretien accordé par Dominique Strauss-Kahn au Monde est intéressant à analyser :
- soutien de Ségolène Royal, il refuse logiquement de se situer dans l'hypothèse d'une victoire de François Bayrou à l'élection présidentielle et, donc, de répondre à la question de sa nomination à Matignon en cas d'élection de François Bayrou à la présidence de la République.
- soutien de Ségolène Royal, il appelle logiquement François Bayrou à soutenir également Ségolène Royal et récuse la stratégie "centriste" du président de l'UDF.
- en revanche, là réside le principal intérêt de cet entretien, Dominique Strauss-Kahn qualifie de "belle majorité pour changer la France" une majorité associant le PS et l'UDF.
À ma connaissance, il s'agit de la première fois qu'un éléphant du PS imagine publiquement un gouvernement PS-UDF...
(ajout du 10 mars : dans Le Parisien, Laurent Fabius a, en revanche, "exclu" que le PS gouverne avec François Bayrou)
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