28 juillet 2015
Statuts du FN et congrès
La Cour d'appel de Versailles a confirmé mardi 28 juillet 2015 l'annulation par le tribunal de grande instance de Nanterre du congrès extraordinaire organisé par correspondance afin principalement de supprimer des statuts du FN la présidence d'honneur.
Que disposent les statuts du FN?
ARTICLE 26 − Travaux de l’Assemblée ordinaire
L’Assemblée ordinaire entend le rapport moral du Président. Elle reçoit éventuellement le compte rendu des travaux d’autres membres du Bureau et le rapport du Trésorier. Elle statue sur leur approbation.
Elle statue souverainement sur toutes les questions relatives au fonctionnement de l’Association, donne toutes autorisations au Conseil d’Administration, au Président et au Trésorier, pour effectuer toutes opérations rentrant dans l’objet de l’Association, et non contraires aux dispositions de la loi du 1er juillet 1901, pour lesquelles les pouvoirs conférés par les présents statuts au Conseil d’Administration, au Président et au Trésorier ne seraient
pas suffisants.
Toutes les délibérations de l’Assemblée Générale sont prises à la majorité des membres présents ou votant par correspondance.ARTICLE 27 − Assemblée extraordinaire
L’Assemblée Générale extraordinaire statue toutes les questions urgentes qui lui sont soumises. Elle seule peut apporter toutes les modifications aux statuts, ordonner la prorogation ou la dissolution de l’Association, ou sa fusion avec toutes autres Associations poursuivant un but analogue, ou son affiliation à toute Union d’Associations.
On le voit immédiatement: les articles du FN son mal rédigés, car les modalités de délibérations ne sont précisés que pour les congrès ordinaires (article 26), pas pour les congrès extraordinaires (article 27).
Dès lors, les juges avaient trois possibilités:
- Soit considérer que les modalités précisées à l'article 26 sur les congrès ordinaires s'appliquent également aux congrès extraordinaires de l'article 27.
- Soit considérer qu'à défaut d'être interdit dans les statuts le vote par correspondance est autorisé. (par honnêteté, j'avoue que je m'attendais à ce raisonnement)
- Soit considérer qu'à défaut d'être prévu dans les statuts le vote par correspondance est interdit. Tel est le raisonnement retenu.
Reste que le FN avait conscience de ce problème de rédaction, puisque les nouveaux statuts (outre la suppression de la présidence d'honneur) devaient y remédier:
ARTICLE 26 − Travaux de l’Assemblée ordinaire
L’Assemblée ordinaire entend le rapport moral du Président. Elle reçoit éventuellement le compte rendu des travaux d’autres membres du Bureau et le rapport du Trésorier. Elle statue sur leur approbation.
Elle statue souverainement sur toutes les questions relatives au fonctionnement de l’Association, donne toutes autorisations au Conseil d’Administration, au Président et au Trésorier, pour effectuer toutes opérations rentrant dans l’objet de l’Association, et non contraires aux dispositions de la loi du 1er juillet 1901, pour lesquelles les pouvoirs conférés par les présents statuts au Conseil d’Administration, au Président et au Trésorier ne seraient pas suffisants.ARTICLE 27 − Assemblée extraordinaire
L’Assemblée Générale extraordinaire statue toutes les questions urgentes qui lui sont soumises. Elle seule peut apporter toutes les modifications aux statuts, ordonner la prorogation ou la dissolution de l’Association, ou sa fusion avec toutes autres Associations poursuivant un but analogue, ou son affiliation à toute Union d’Associations.ARTICLE 28 − Délibérations des assemblées
Toutes les délibérations des Assemblées sont prises à la majorité des membres présents ou votant par correspondance.
(...)
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Commentaires
Bonjour,
Bien que je n'ai pas eu accès à aucune des pièces de la procédure, je ne suis pas sûr que votre interprétation soit la bonne. A moins peut-être que vous ayez eu des informations de première main?
Pour moi, la question n'est pas tellement celle de savoir si les modalités d'assemblée générale ordinaire s'appliquent à celles extraordinaires, mais tient plus au caractère disciplinaire caché que revêt la modification des statuts.
De ce que j'ai compris de la position de Jean-Marie Le Pen (enfin, du moins, de ses avocats), il reproche également au congrès de présenter l'adoption des statuts sans qu'il soit fait mention particulière de la suppression du statut de président d'honneur.
Or, cette mesure a un caractère éminemment disciplinaire, ce que Marine Le Pen et la direction du FN auront beaucoup de mal à contester puisqu'ils passent leur temps à présenter la suppression de sa présidence d'honneur comme le moyen de couper le sifflet à Jean-Marie Le Pen.
Dès lors que cette mesure a un caractère disciplinaire, il faut 1) énoncer clairement à la personne visée les reproches qui lui sont formulées (et là dessus, si le FN s'en était donné la peine, j'ai cru comprendre qu'il y avait matière) et 2) permettre à la personne visée par la sanction de faire entendre ses moyens de défense.
Or, le 2) n'était en l'occurrence pas rempli, compte tenu de la mise en oeuvre du congrès par voie postale, sans que le caractère disciplinaire de la mesure soit mis en avant et sans que JM Le Pen puisse s'exprimer.
Sans connaître la décision, je pense que cet argument aurait été bien plus décisif juridiquement que l'interprétation des clauses des statuts (mais qui ont pu suffire à la cour pour justifier sa décision). Il faut généralement un peu de temps pour que ces arrêts soient mis à disposition des professionnels, mais si mon interprétation est bonne, je me ferais une joie de confirmer ou non mon intuition.
Écrit par : Tythan | 29 juillet 2015
Bonjour, ce que vous dites concerne il me semble l'autre jugement, celui sur la suspension de la qualité d'adhérent et non celui sur le congrès extraordinaire.
Jean-Marie Le Pen a en effet été suspendu du FN par le bureau exécutif réuni en formation disciplinaire le 4 mai 2015. Or, cette délibération a aussi été annulée par la justice, le 2 juillet 2015, en raison du lien opéré entre la durée de cette suspension et la tenue du congrès extraordinaire de révision des statuts. Ce qui revenait à conférer de fait à ce congrès extraordinaire un pouvoir de sanction dont il ne dispose statutairement pas.
Écrit par : Laurent de Boissieu | 29 juillet 2015
Merci pour votre réponse. Je n'ai sans doute pas été assez clair, mais ce que je voulais vous indiquer, c'est que justement ce même argument, celui selon lequel le FN aurait dû laisser la possibilité à Jean-Marie Le Pen de se défendre, s'applique pour les deux procédures.
Le point juridique, c'est que la suppression de la présidence d'honneur, noyée au sein d'une refonte générale des statuts du parti, peut être analysée comme une sanction disciplinaire, et aurait donc dû être identifiée comme telle et ouvrir le droit pour Jean-Marie Le Pen.
Comme je vous l'ai expliqué, je n'ai pas le jugement entre les mains, mais il m'étonnerait beaucoup que cet argument n'ait pas été utilisé par les avocats de Jean-Marie Le Pen, d'autant que comme expliqué Marine Le Pen présentait ouvertement la suppression de la présidence d'honneur comme une sanction à l'égard de Jean-Marie Le Pen.
Écrit par : Tythan | 29 juillet 2015
Pardon, faute de frappe : à la fin du second paragraphe rajouter "de se défendre". Désolé pour cette erreur.
Écrit par : Tythan | 29 juillet 2015
Monsieur de Boissieu, partagez-vous l'idée que le "journalisme" est, en France, plus de la reprise du fil de l'AFP que du travail sérieux? J'en veux pour preuve qu'un journaliste de l'AFP a fais l'erreur d'interpréter la référence à St-Just dans l'interview de Jean-Marie Le Pen, dans le JDD de ce jour, comme visant Florian Philippot alors qu'en réalité il faisait référence à Wallerand de St-Just, son ancien avocat et farouche adversaire aujourd'hui. Cette erreur est reprise absolument partout. A croire que l'AFP est parole d'évangile !
Écrit par : Vartan Amegognian | 09 août 2015
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