26 janvier 2010
Clarification au centre
Les élections régionales vont être l'occasion de franchir un pas supplémentaire dans la clarification de l'espace centriste du paysage politique française. Dans une tribune publiée hier dans Le Figaro, le sénateur des Yvelines Nicolas About, conseiller régional sortant et président du groupe Union centriste du Sénat, a ainsi annoncé qu'il se mettait "en congé" du MoDem et qu'il rejoignait la liste de la majorité présidentielle conduite par l'UMP Valérie Pécresse.
L'élu dénonce de la part de son parti "des candidatures de simple témoignage et des alliances de pure opportunité". Une allusion à la tête de liste en Île-de-France, Alain Dolium, jusque-là simple adhérent, et à la perspective d'une alliance avec la gauche au second tour. "À mes yeux, les élections régionales sont bien plus qu'un énième tour d'échauffement en vue des échéances présidentielles à venir", poursuit Nicolas About en visant François Bayrou et un MoDem selon lui "enfermé dans une posture d'opposition systématique au gouvernement".
Ce choix n'est pas une surprise : l'analyse de la dizaine de votes depuis les dernières élections sénatoriales où le groupe Union centriste s'est divisé entre majorité et opposition montre que Nicolas About a systématiquement voté comme les élus de la majorité et non comme les proches de François Bayrou. Il n'est pas le seul : c'était également le cas de Michel Mercier, son prédécesseur à la présidence du groupe, justement "en congé" du MoDem depuis sa nomination au gouvernement, en juin 2009.
Si le Nouveau centre est pleinement impliqué dans les listes de la majorité présidentielle, listes qu'il conduit en Bourgogne et dans le Nord-Pas de Calais, le troisième parti issu de l'UDF, l'Alliance centriste, vient de suivre le même chemin. Son fondateur, l'ancien ministre Jean Arthuis, président du conseil général de la Mayenne, a en effet annoncé qu'il était en train de négocier dans sa région un accord avec l'UMP Christophe Béchu. Parmi les candidats de l'Alliance centriste devrait notamment figurer Laurent Gérault, ex-président du MoDem du Maine-et-Loire et ex-chef de file pour les régionales dans les Pays de la Loire. Objectif de Jean Arthuis : parvenir à former un groupe de centre-droit au conseil régional.
La clarification de l'espace centriste du paysage politique français devrait se poursuivre l'année prochaine, à l'occasion des élections sénatoriales. Le Nouveau centre, qui pourrait d'ici là essayer de récupérer le sigle UDF, espère alors fédérer autour de lui les divers "centristes" de la majorité afin de former au Sénat, comme à l'Assemblée nationale, un groupe de centre-droit.
Laurent de Boissieu
© La Croix, 26/01/2010
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Commentaires
Et bien ! Si ça continue à ce rythme, et malgré tous les efforts de François Bayrou, le centre va se retrouver divisé en centre-gauche et enctre-droit et donc... disparaître à nouveau.
Écrit par : Brath-z | 26 janvier 2010
C'est en effet la logique des élections à deux tours ! ...sauf la présidentielle, unique possibilité de recomposer le paysage politique.
Écrit par : Laurent de Boissieu | 26 janvier 2010
Qui sait ? Peut-être doit-on voir dans le phénomène décrit par Laurent de Boissieu, une mutation profonde du paysage politique français.
En considérant la vie de notre pays sous la IIIème république, on se rend bien compte de l'importance de la négociation entre partis, du rôle stratégique qu'y tenaient les organisations intermédiaires, de la place déterminée que le système allouait aux individus. En bref, l'individu n'avait d'importance qu'à sa place, et il convenait qu'il sache se tenir à sa place.
Au fil des ans, ce système a évolué pour aboutir à un regard collectif centré sur l'individu, pas sur la place qu'il doit tenir au sein de la collectivité. Religion du jeunisme, importance de la consommation dans l'économie, difficulté des partis politiques à mobiliser sur un thème donné, revendications catégorielles incessantes sont des réalités qui illustrent cet état de fait.
En même temps, nous voyons les populations croître et l'espérance de vie augmenter.
La concomitance de ces phénomènes laisse penser que notre société évoluera vers des vecteurs plus directifs, moins parlementaires, plus administratifs que judiciaires.
Les formations centristes ont par essence vocation à servir de tampons entre des solutions opposées. J'ai tendance à croire qu'elle n'ont plus place dans la configuration politique de demain.
Sûrement, disparaitront-elles au profit d'organes dont la vocation sera d'expliquer les décisions prises en amont au sujet de droit, qui ne pourra plus s'en plaindre lorsque la phase de négociation se sera écoulée.
En clair, le nobliau de province aura disparu au bénéfice d'un commissaire du gouvernement dont l'essence de la mission sera de convaincre les administrés d'adhérer aux principes décidés par la tête de l'état, et de recueillir leurs doléances individuelles pour les porter à l'échelon régional de proximité.
Fini, les "combinazione" qui ont fait deux siècles de bons notaires, bons médecins, bons pharmaciens, bons maires et bons députés, ...
Écrit par : Jean Laporte | 26 janvier 2010
L'analyse de Jean Laporte me semble très juste et très réaliste, mais n'est-il pas possible d'envisager le grand retour des différents idéologiques en politique ? Dans cette perspective, la naissance de "gauche", "droite" et "centre" caractérisés par une idéologie (comme c'était le cas sous le Second Empire, avec une "droite" bonapartiste et une "gauche" distinguée en deux camps, l'un royaliste l'autre républicain, ou encore lors de l'éphémère parlement PCF-Troisième Voie-gaullistes) ne se conclurait pas par une "cogestion" administrative mais par des affrontements à deux, trois, quatre, etc.
Écrit par : Brath-z | 27 janvier 2010
C'est en tout cas souhaitable, ...
Mais, en l'état actuel du ressenti collectif de nos concitoyens, cela suppose que les porteurs de ces idéologies auront gagné le respect d'une partie importante de la population.
l'échange de points de vue différents ou opposés suppose que l'on dispose d'un argumentaire objectif pour les faire valoir dans un environnement apaisé.
Cependant, le fractionnement catégoriel des intérêts est la source de beaucoup de méandres qui toutes conduisent au rejet de l'autorité, puisqu'il y a un moment ou la norme heurte l'intérêt de l'individu.
Peut-être faudrait-il que les politiques soient capables de porter un projet qui suscite l'enthousiasme chez beaucoup d'entre nous.
Pour cela, deux conditions me semblent indispensables :
D'abord, que les personnels politiques soient capables d'aborder les sujets publics sans arrière pensées connectées à la gestion de leur carrière. Aujourd'hui, cela me parait assez difficile !
Mais, il faudrait aussi que nos concitoyens aient les moyens d'information et d'analyse pour embrasser l'ensemble des déterminants géostratégiques qui leur permettent de se positionner par rapport à une prise de position publique. Si l'on considère l'état de nos outils de formation, éducation nationale, formation professionnelle, et que l'on s'intéresse à leur résultat, cela est impossible !
Demeure le fait que l'information ne circule pas à la même vitesse qu'au XIXème ou au XXème siècle. Ce soir, Steve Jobs nous a présenté l'i-pad d'Apple qui va certainement révolutionner le rapport des lecteurs à la presse ! tout cela pose question, ...
J'aimerais, comme vous je suppose, que nous soyons à l'aube de riches débats d'idées, malheureusement, ce que je constate m'invite à croire le contraire.
Écrit par : Jean Laporte | 27 janvier 2010
Quelques réactions à chaud. Je suis d'accord avec vos constats, mais, compte tenu de mon grand âge (;-) je suis un brin plus pessimiste (à court terme) sur l'évolution en cours. 1) Internet est formidable, celà va de soi. Mais c'est aussi un outil désastreux pour qui n'a pas eu auparavant une solide formation classique pour structurer sa pensée et apprendre l'analyse et l'appofondissement. Internet est en effet le règne de l'éphémère, du court et rapide (Twitter ), du "rigolo" (il faut attirer des esprits en quête perpétuelle de nouveauté) et de l'émotion (quoi de mieux qu'une petite vidéo sur Youtube pour faire passer un message). Sans oublier le brouillage de toute hiérarchie de l'information (pour un jeune - je l'ai vérifié avec des stagiaires là où je travaille - un message sur un forum a autant de valeur qu'un communiqué officiel). J'en viens au fait : face à ces esprits totalement atomisés et en zapping perpétuelle (délices et poisons de la serendipité), il est très difficile de faire passer une idéologie. Celà demande des lecteurs/auditeurs/citoyens encore capables d'écouter une longue démonstration de fond (les fondamentaux de l'idéologie), de chercher à structurer ses idées (il faut du temps et du recul) et de réagir de manière rationelle et cohérente (et non par émotion comme la société de l'image TF1/Youtube nous l'apprend. TB édito dans Le Monde il y a qques mois sur le recourcissement des plans sur la TV afin d'accrocher l'audience, mais au détriment de la coompréhension de la démonstration de celui qui parle). L'attrait du SMS/zapping/rigolo/émotions est trop fort chez 95% des jeunes pour que ceux-ci s'intéressent de près ou de loin aux sujets qui nous préoccupent ici.
2) Mon constat sur le repli matérialiste de chacun (Ma playstation, Mon iPod, Mon blackberry, Mes vacances au club, Ma famille,..) et le désintéret pour la chose publique (spectacle auquel on assiste de loin) sera plus classique.
Écrit par : Libéral européen | 28 janvier 2010
Bien sûr, Libéral européen, votre constat est exact.
Mais, on ne parle qu'à ceux qui nous écoutent ! Comme vous le notez dans votre post, la hiérarchie des sources disparaît, le recul propice et nécessaire à l'analyse diminue, l'individualisme augmente.
Mais, c'est notre monde !!! on ne reviendra pas en arrière, et la nostalgie n'a jamais engendré l'efficacité.
Il faut donc certainement comprendre les nouveaux vecteurs de communication, clarifier le message à convoyer et s'adapter au rythme qui nous conduit.
Pour ce qui est des moyens, on peut parier sur la video au détriment de l'écrit, sur des messages courts, qui ne décrivent qu'une idée.
C'est le contenu qui reste à élaborer, ...
Quelle société française pour demain ? quelle surface de l'état ? Qui doit-on mettre en avant ? les cadres de direction des fleurons de notre industrie, les polytechniciens, les élus de la Nation, les personnes qui agissent dans le cadre des professions réglementées, notaires, médecins, pharmaciens, taxi, ... ou bien les créateurs de projets, les responsables de PMI, les employés créatifs, ceux qui sacrifient à la mobilité au détriment d'une vie de famille, etc...
Ces choix sont un préalable nécessaire à la définition du message, ni de droite, ni de gauche, mais de France, qui pourra seul nous sortir de l'ornière gluante qui nous aspire vers la fin d'une belle histoire.
Ne voyez là qu'un point de vue, en aucun cas il ne s'agit de vérités, ...
Écrit par : Jean Laporte | 28 janvier 2010
D'une manière générale, j'ai tendance à souscrire à ce mot du professeur Choron "un jeune ça pense pas, ça ne fait que répéter papa-maman et le prof, alors ça devrait fermer sa gueule en attendant d'apprendre sa vie", ce qui n'empêche évidemment pas "les jeunes" (catégorie générationnelle dont je fais partie, ayant moins de 26 ans) de se cultiver ni d'avoir des opinions, mais de là à avoir un engagement marqué et/ou une vision du monde exhaustive...
Concernant les autres générations, je citerais un ami à moi : "en-dehors des périodes de crise, du genre guerre, révolution, etc., les gens en général sont plutôt peu ou pas engagés politiquement, et ça se comprend vu que ce n'est pas, dans les périodes de paix, la politique qui détermine leur vie quotidienne".
Tout ça pour dire que je ne pense pas la relative inertie politique de la population comme spécifique à notre temps. En revanche, et c'est plus préoccupant, le manque de culture politique et générale est, lui, flagrant. Un mien professeur professait que la "culture générale d'autrefois" était remplacée par les nouvelles générations par une culture générale plus actuelle, comprenant les thématiques et les enjeux de notre temps... force est de constater que non.
Écrit par : Brath-z | 28 janvier 2010
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