Comment le MoDem veut piéger Jean-Louis Borloo
27 septembre 2012
Invitée de l'émission "Face aux chrétiens", Marielle de Sarnez, vice-présidente du MoDem, a proposé l'organisation d'une "primaire au centre, du centre droit au centre gauche".
Cette proposition, qui s'adressait explicitement à Jean-Louis Borloo, peut se refermer comme un piège sur le président de la nouvelle Union des Démocrates et Indépendants (UDI).
Bien que positionnée à droite et non au centre, l'UDI se prétend en effet centriste. Or, une "primaire au centre" mettrait Jean-Louis Borloo devant ses contradictions, lui qui envisage plutôt - comme Hervé Morin - de participer à une primaire à droite avec l'UMP: "Tu te dis centriste? Chiche! Alors participe à une primaire du centre avec le MoDem plutôt qu'à une primaire de la droite avec l'UMP", dit en substance Marielle de Sarnez.
Dans la même émission, Marielle de Sarnez me répond par ailleurs qu'elle n'est "pas fermée à l'idée d'une double appartenance" entre le MoDem et l'UDI. Quatre remarques.
Premièrement, comme je l'avais déjà exposé cette semaine dans un article, c'est le seul moyen de masquer les départs de cadres et d'élus vers l'UDI.
Deuxièmement, ça ne peut fonctionner que si l'UDI accepte aussi, en retour, la double appartenance avec le MoDem.
Troisièmement, si le MoDem autorise la double appartenance avec l'UDI, parti de centre droit, il doit au moins symétriquement l'autoriser avec les partis de centre gauche (PRG notamment).
Quatrièmement, si le MoDem autorise pour ses membres l'adhésion à une autre formation politique, cela signerait de fait la fin du MoDem en tant que parti et sa transformation en simple club politique. Finalement peut-être la seule solution pour réunir dans la même structure des gens du centre droite au centre gauche, qui n'envisagent pas les mêmes alliances électorales.
7 commentaires
1 remarque et 1 question.
La remarque c'est que le concept même de primaire renvoie à la lente mais inexorable américanisation des esprits français, qui se métastase dans tout les domaines.
Les primaires sont la négation de la politique, de l'engagement politique. Vous souhaitez voter pour votre candidat ? Adhérez au parti de votre choix ! Laisser voter les citoyens lambda est un véritable scandale, et un "truc" pour favoriser ceux qui ont le plus de pognon et de relais médiatiques.
La question, à M. de Boissieu, est la suivante : pourquoi cet amour des partis du centre pour le terme "démocrate" et cette absence du terme "républicain" dans la dénomination de leurs nombreux partis depuis un siècle ?
@ Colbert : un siècle, vous exagérez ! Le parti du centre qui a le mieux réussi électoralement a été le Mouvement Républicain Populaire, de la Libération aux débuts de la Vème République.
Il est cependant exact que, en France particulièrement (mais dans d'autres pays aussi : Espagne, Grande-Bretagne…), le Centre a été apprécié par les régions périphériques comme une façon de gérer à long terme leur relation avec une capitale : en dépassant, donc, les hoquets des alternances et luttes intestines du "Palais". "Républicain" désigne alors une organisation politique qui donne un pouvoir bien plus grand aux personnes en position centrale ; "démocrate" rappelle l'attachement aux droits civiques et à l'égalité de principe : un habitant d'Ouessant ou de Mayotte devrait compter autant qu'un Parisien.
En France, le mot "républicain" est actuellement associé par l'opinion publique à un contrôle de l'appareil parisien sur la vie économique, sociale, culturelle, voire religieuse… du pays. Ce contrôle "de haut en bas" d'un noyau de décision, espèce de dictateur impersonnel et réputé bienveillant, sur la vie du pays — Domenach écrivait : "l'URSS en beaucoup mieux" — se concrétise par l'intermédiaire d'une administration culturellement homogène et finalement très autonome par rapport aux élus de la Nation : ce que Nicolas Sarkozy appelait, pour s'en plaindre, les "corps intermédiaires" dénoncés par Nicolas Sarkozy.
Le mot "démocrate" met l'accent sur l'autonomie des milieux sociaux, des entreprises, des associations, des familles, des écosystèmes, etc., au service desquels devrait être l'État, ses lois, ses administrations. Les démocrates sont convaincus que "la société ne se gouverne pas par décret", selon le mot de Crozier. Les "corps intermédiaires" désignent, dans le jargon traditionnel de l'Eglise catholique (une des sources d'inspiration du Centre), les organisations sociales et économiques spontanées (entreprises, associations, syndicats, collectivités locales…) qui permettent à l'individu d'exercer effectivement sa liberté, "de bas en haut", l'Etat en étant l'arbitre central.
Aux USA les deux termes seraient utilisés dans un sens presque inverse : l'administration washingtonienne est très majoritairement "démocrate", les républicains insistent sur l'autonomie des États (fédérés) et collectivités. C'était, évidemment, l'inverse à l'époque de la Sécession.
à Colbert :
les "centristes" sont en fait une nébuleuse regroupant pour l' essentiel les démocrates-chrétiens, un courant de la droite regroupant l' aile modérée des adversaires historique de la République.
Ils se qualifient de démocrates pour marquer leur différence avec les catholiques adversaires de la République et soumis au Vatican qui sont pour l' essentiel monarchistes.
Ils acceptent la République mais ne la défendent pas contrairement aux jacobins à gauche et aux bonapartistes à droite.
D' où leurs alliances fréquentes avec les orléanistes (ex. : l' UDF) et leur difficulté à s' allier aux rad-soc comme Hollande trop anticléricaux à leur goût.
Honte à moi, j'avais effectivement oublié le MRP. Mes plus plates excuses aux lecteurs du blog ! :(
Pour ce que compte le cantre, aujourd'hui...
le "centre", pardon.
En total accord avec ton article. C'est ce que nous envisagions sérieusement pendant la campagne des législatives avec T. Lanoy.
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