Pourquoi l'UMP n'éclatera pas
04 mai 2012
Je suis étonné par le nombre de commentateurs que j'entends prédire un éclatement de l'UMP en cas de défaite de Nicolas Sarkozy. Je n'y crois pas du tout. Pour des raisons politiques (masse critique atteinte par l'UMP), mais également pour une raison matérielle: l'argent, le nerf de la guerre également en politique.
Première hypothèse: l'éclatement de l'UMP avant les élections législatives. J'écarte cette hypothèse car le parti en général et les députés sortants en particulier concentreront alors toutes leurs forces pour sauver les meubles aux législatives: à partir du moment où la question de l'alliance avec le FN est tranchée négativement, ni l'aile droite ("Droite Populaire") ni l'aile gauche ("Humanistes") de l'UMP n'auront intérêt à s'en séparer. En 2007, l'UDF avait certes éclaté entre l'élection présidentielle et les élections législatives. Mais c'est parce que François Bayrou avait rompu avec la droite en ne soutenant pas Nicolas Sarkozy au second tour de la présidentielle: la majorité des élus sont restés à droite en créant en catastrophe le Nouveau Centre, tandis que François Bayrou confirmait son passage au centre en lançant le MoDem. Or, il n'y a pas aujourd'hui semblable rupture politique au sein de l'UMP, malgré les divergences idéologiques et stratégiques.
Second hypothèse: l'éclatement de l'UMP après les législatives. J'écarte aussi cette hypothèse ne serait-ce qu'en raison des règles de financement des partis politiques. Afin d'y avoir droit, une formation doit présenter aux législatives précédentes un minimum de 50 candidats en métropole obtenant au moins 1% des suffrages exprimés. Bref, en cas d'éclatement, le tronçon qui ne prendrait pas juridiquement la suite de l'UMP ne recevrait aucun financement public direct, l'autre continuant à percevoir la part correspondant aux voix obtenues aux législatives par les dissidents (comme ce fut le cas pour le MNR après la scission du FN et comme c'est le cas aujourd’hui du Parti Radical après la rupture de son contrat d'association avec l'UMP). La seule possibilité pour les parlementaires dissidents consisterait à se rattacher (seconde fraction du financement public) à un autre parti ayant droit au financement public (première fraction), en métropole ou outre-mer (où le seuil du nombre de candidatures ne s'applique pas), à l'exemple du Nouveau Centre depuis 2007. C'est également pour cette raison que l'Alliance républicaine, écologiste et sociale n'est selon moi pas morte, même si le Parti radical a trahi le Nouveau Centre (lui-même divisé) en ne soutenant pas Hervé Morin après la non-candidature de Jean-Louis Borloo: sans avoir forcément d'existence publique, il pourrait au moins s'agir d'une structure commune destinée à recevoir le financement public, avant reversement à leur association de financement respective (Association de Financement Politique du Parti Radical: AFPPR et Association de Financement du Parti Social Libéral Européen: AFPSLE).
Les diverses sensibilités de l'UMP ont donc intérêt - ce qui a du reste déjà commencé - non pas à casser l'UMP mais à se mettre en ordre de bataille afin de tenter d'en prendre le contrôle en son entier, à l'occasion du congrès prévu à la fin de cette année. Avec l'élection d'un président, et un éventuel affrontement interne pour ce poste entre Jean-François Copé et François Fillon.
7 commentaires
du coup si un des deux groupes se rend compte qu'il va perdre la bataille pour le contrôle de l'UMP, n'a-t-il pas intérêt à créer un nouveau parti avant les législatives, afin que ses candidats soient élus sous son nom (ce qui n'empêche pas une co-investiture avec l'ump) et qu'il ait les financements publics? (au niveau local les militants suivront leur député pour la campagne de toute façon)
ou et-ce qu'ils n'ont tout simplement pas le temps
Tout à fait d'accord avec cette analyse. Les syndicats éclatent, ce sont des confédérations qui se recomposent à volonté ; les partis n'éclatent pas. Certains deviennent obsolètes, dépérissent (l'UDR, la SFIO, le Parti radical, la Nouvelle UDF…), et ressuscitent dans une nouvelle formation. Certains dissidents créent des micro-partis, c'est de la poussière sur la carte.
D'accord aussi avec Laurent.
La question n'est pas tant un véritable éclatement de l'UMP que la recomposition du centre droit : autours de quel pôle ? Quelle personnalité ?
Du coup, l'UMP peut perdre quelques forces sur son aile gauche si un centre droit autonome émerge en réaction au discours national-conservateur dominant de l'UMP. Mais ce centre-droit peut après tout aussi émerger au sein de l'UMP autour des Humanistes de l'UMP.
Celà dépendra donc de la capacité de l'UMP à accepter des courants puissants, avec des leader ayant une certaine liberté de parole, en son sein.
@ adrien : il faudrait un chef, des locaux, une logistique, un complot de longue date, et que le tout n'ait pas été trahi et éventé depuis des mois. Ce genre de choses n'existe pas. Le plus qui puisse exister comme manoeuvre de scission dans un parti, c'est une tribune cosignée (genre les 43 chiraquiens), une entrée au gouvernement, et un groupe parlementaire autonome. Mais dans les trois cas, pas de création de parti proprement dit.
Exception : le groupe parlementaire CDP de Jacques Duhamel avait progressivement évolué en parti, parti gouvernemental à la façon du Nouveau Centre, mais parti fantôme rapidement réabsorbé par le Centre démocrate (par la fondation du CDS).
Et les défections individuelles au moment de l'élection? Si le député UMP a besoin d'un accord avec le FN pour l'emporter, beaucoup ne vont-ils pas se laisser tenter d'autant plus que Le Pen devrait encourager cela?
@Moi-même: je ne pense pas, sauf éventuellement (et encore!) quelques défections marginales et locales, avec exclusion des intéressés de l'UMP. Il faut bien voir que là où l'UMP est le plus à droite, c'est le plus souvent là où le FN est le plus fort; bref, le principal adversaire dans ces endroits pour l'UMP c'est le FN et non le PS.
Sauf que le FN, depuis que Marine est arrivé, c'est un programme encore plus dépensier que Mélenchon. Donc c'est voué à changer. De plus en plus le FN prendra des voix à la gauche en attirant un électorat souverainiste de gauche, de moins en moins elle en prendra à droite, au fur et à mesure que ses électeurs se rendront compte qu'elle a un programme irréalisable.
Son score, c'est le court terme. Les nouveaux électeurs de gauche ravis du nouveau programme. Les électeurs de droite qui ne se sont pas encore rendu compte que le programme n'est plus celui du père.
Il serait de salut public qu'une vraie droite se crée, car elle n'existe pas en France... Quand après presque 15 ans de droite sur 20 on dépense encore 52.5% de notre PIB, il y a arnaque !
Il n'y a aucune droite en France et il n'y en a jamais eu.
Et il n'y a jamais eu de parti libéral ici, le seul candidat libéral à une présidentielle qu'on ait eu récemment c'était Alain Madelin, et encore, il est dans un délire dogmatique lorsqu'il refuse la réciprocité protectionniste avec les pays tricheurs.
Quand on entend "je suis libéral" en France : entendez social-libéral comme en Suisse, en Australie.
Quand on entend "je suis social-libéral" : entendez social-démocrate comme la Suède, les Pays-Bas ou la Finlande.
Quand on entend "je suis social-démocrate" : entendez le bon vieux populisme de gauche qu'on appelle marxisme. Comme Cuba dans le pire des cas, ou comme la France, puisqu'on est à mi-chemin entre Cuba et les pays-bas du point de vue des dépenses publiques. Eh oui, on en est là !
Tout ça pour dire que ça ferait du bien à notre pays qu'un vrai parti libéral sorte de terre et fusionne avec le parti libéral démocrate. Novelli, Longuet, et la Droite Populaire auraient tout intérêt à y songer s'ils avaient un peu de courage !
Même sans gagner, jouer un rôle de poids sur la balance influerait grandement les programmes de tous les partis et influerait sur l'opinion des médias ainsi que de la population.
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