Qui se cache derrière Jacques Cheminade?
20 mars 2012
Jacques Cheminade est de nouveau le candidat surprise de l'élection présidentielle de 2012, comme en 1995.
Faut-il le considérer comme un candidat comme les autres? Difficile selon moi en raison de l'opacité qui entoure le mouvement qu'il représente, successivement actif en France sous la dénomination du Parti Ouvrier Européen (POE), de la Fédération pour une Nouvelle Solidarité (FNS), puis de Solidarité et Progrès (SP). Point commun: la revue Nouvelle Solidarité.
À l'origine se trouve un homme politique nord-américain: Lyndon LaRouche, ancien trotskiste (Socialist Workers Party), puis fondateur en 1968-1969 du National Caucus of Labor Committees (NCLC) et candidat aux élections présidentielles américaines successives (cf. Lyndon LaRouche Political Action Committee), soit en tant qu'indépendant soit en participant à la primaire du Parti démocrate.
1) Qui se cache derrière Nouvelle Solidarité?
-> un mouvement d'extrême droite?
"...ses liens avérés avec l'extrême droite américaine, et les multiples déclarations antisémites de ses dirigeants américains permettent de l'analyser comme une composante de l'extrême droite isolationniste, écrivent Jean-Yves Camus et René Monzat (1). En France, en revanche, la presse du POE ne véhicule pas de tels dérapages, ce parti est nettement hostile au Front national et il choisit de préférence des alliances ponctuelles, dans le cadre de ses campagnes contre la drogue ou pour l'armée, avec certains secteurs des partis de la droite classique".
Le Centre de données socio-politiques (CDSP), créé par la Fondation nationale des sciences politiques (FNSP) et par le Centre national de la recherche scientifique (CNRS), classe également dans ses fichiers de résultats électoraux les cheminadistes à l'extrême droite.
-> des liens avec des services de renseignements?
"Ses rapports, depuis 1977 au moins, avec la Defense lntelligence Agency américaine, puis avec différents responsables des services secrets américains ou membres du Conseil national de sécurité, le font plus participer au monde du renseignement qu'à celui de la politique", poursuivent Jean-Yves Camus et René Monzat (1).
Dans un autre ouvrage (2), le journaliste René Monzat démontre ainsi le parallèle entre les prises de position de Lyndon LaRouche, de la Defense lntelligence Agency (DIA) et du lobby militaro-industriel américain. La DIA représente le renseignement militaire face à la Central Intelligence Agency (CIA), "l'une des têtes de Turc permanentes du POE", souligne l'auteur. Expliquant que "quand il attaque la CIA, il ne vise pas l'ensemble des renseignements américains, comme font les gens de gauche, mais il participe de l'hostilité des renseignements militaires à l'encontre de la seule CIA".
René Monzat signale en outre en mars 1984 une publicité pour l'Executive Intelligence Review (EIR, publiée par Lyndon LaRouche) signée par "Norman Bailey, ancien assistant spécial du président Reagan pour les affaires de Sécurité nationale": "Environ un an après que j'eus rejoint le Conseil de sécurité national, j'ai été contacté par des représentants de Lyndon LaRouche. J'ai accepté de les rencontrer, et les ai rencontrés à plusieurs reprises par la suite. J'ai trouvé ceci utile, tout simplement parce qu'ils ont à mon avis l'un des meilleurs services de renseignement privés du monde."
2) Les idées politiques de Nouvelle Solidarité: rupture et continuités.
-> rupture: les références idéologiques
Aujourd'hui, les références politiques de Jacques Cheminade sont essentiellement Franklin Delano Roosevelt, Charles de Gaulle, Jean Jaurès et Pierre Mendès France. Dans sa profession de foi pour l'élection présidentielle de 1995, par exemple, figuraient deux citations: l'une de Jaurès ("Tout individu humain a droit à l'entière croissance"), l'autre de De Gaulle ("La politique de la France ne se fait pas à la corbeille").
"Nous ferons ce que Karl Marx, Rosa Luxembourg et Lénine auraient fait aujourd'hui", proclamait pourtant à l'origine Nouvelle Solidarité (12 avril 1975), qui militait à l'époque pour des "gouvernements ouvriers, composés essentiellement des PC, PS et des syndicats" (René Monzat, op. cit., page 247).
Sur le plan idéologique, la rupture est donc totale.
-> continuité: le conspirationnisme
Dans un article intitulé "Les deux conspirations" et publié le 19 décembre 1977, Lyndon LaRouche explique sa vision du monde. Selon lui, "deux ensembles de réseaux" ayant "une continuité sans faille à travers l'histoire" se disputent le destin des hommes. Leur origine "remonte à environ 3.000 ans, au zénith de la culture phénicienne". D'un côté, "les réseaux anti-humanistes, dont le centre spirituel depuis plus de deux cents ans est la Cité de Londres. L'objectif politique de ces derniers est l'instauration d'un ordre mondial antirépublicain contrôlé soit par un véritable empire, soit par l'intermédiaire d'un 'concert de nations' régi par Londres dans le même but qu'un ordre impérial". De l'autre, des réseaux caractérisés par "leur humanisme néo-platonicien" et ayant "pour objectif politique déterminant la réalisation de l'hégémonie mondiale d'un système œcuménique de républiques humanistes souveraines". Pour conclure, Lyndon LaRouche précisait que ses propres "comité ouvriers d'aujourd'hui sont un élément organique de la même conspiration qui a organisé et dirigé la Révolution américaine, puis a rédigé la Constitution des États-Unis". La dénonciation de l'"oligarchie financière" ou de "l'empire de la City et de Wall Street" figure encore en bonne place dans le programme présidentiel de Jacques Cheminade.
Entre services de renseignements et conspirationnisme, dans son livre The power of reason: a kind of autobiography (1979, New Benjamin Franklin House) Lyndon LaRouche voit la main des services secrets partout, de l'extrême gauche anarchiste à l'extrême droite nazie (pages 107-111):
It is a simple matter of fact that Bakunin's anarchist international was created through Rothschild funding and coordination (primarily), and that it was British intelligence which maintained the anarchist organizations, and employed them as the principal terrorist force of the period from the 1870s into the First World War. It is ironical, but not accidental, that the same Switzerland bases and financial conduits used for anarchist assassins then are providing logistical bases for international terrorism in Europe today.
British operations against Karl Marx and his influence were an outgrowth of Marx's role in the U.S. Civil War - and not the events of the Paris Commune. The Bakunin project, launched through Rothschild's, including Rothschild funding of Bakunin through conduit Alexander Herzen, was a central feature of that effort.
The Bakunin and associated projects for containing Marx - short of the political penalties of martyring him - were complemented by British creation of the Socialist International.
Every continental radical grouping was on the string of financial networks allied to the City of London. The sudden creation of the Bakunin anarchist international was effected through (chiefly) Rothschild networks, which deployed agents under their control, with appropriate funding. In Germany, both the Lassalleans and Eisenachers were under control of different channels of financial networks coordinated from London.
It is to be emphasized that the "left" so controlled by British-centered networks is at best a Hobbesian alliance of "left forces." Bitterly competitive in respect to franchises for "gate receipts," and for favors from above, the various groupings, both competing parties and factions within parties, would chiefly prefer to cut one another's throats rather than ally. The essential form of organization of these parties, leagues, factions, and so forth is not defined by differences of principle, but by the bureaucratically organized following of individual personalities or groups of personalities.
However, the fact that the small seed-crystals of such parties, leagues, circles, factions are deployed to recruit from certain strata and according to certain propaganda and tactical postures has the effect of enslaving the leadership of those groupings to the policy profiles the organizations acquire as "traditions" in that way.
The truth of the matter is reflected in the commonplace position and function of "intellectuals" in such groupings. The relationship of British intelligence agent August Bebel to Eduard Bernstein, Karl Kautsky, and associates in the German Social Democracy is paradigmatic.
During recent years, public knowledge has been shocked by the publication of documents proving that August Bebel was a British spy, pure and simple, during the concluding period of his life. What was shocked by these disclosures was nothing but an ingenuousness which had. not already recognized Bebel as a British agent from the standpoint of conclusive evidence provided by Behel's practices and policies as SPD leader. Bebel was working openly for the same geopolitical policies as Lord Milner, Mackinder and Haushofer. Ebert, Scheidemann, and Noske did not become British agents during the postwar period; they were British agents under British agent Bebel.
The case of Eduard Bernstein exemplifies another important feature of the arrangements.
It is usually cheerfully assumed that Eduard Bernstein came under the influence of the Fabian Society in London, and so became a British agent-of-influence after the death of Friedrich Engels. How naive!
Bernstein was an outright British intelligence operative, even while Engels was alive. This aspect of Bernstein did not begin during the 1890s. If one troubles to trace his career from Germany, via Switzerland, into London, one finds the associations and correlated political evidence of his practice and doctrines which establish his true credentials from his youth.
A competent political-intelligence institution does not plant an agent-in-place into an organization it wishes to influence or control by such means by instructing the plant to overtly wreck the premises from the moment of his entry. Nor does such an institution cultivate a thorough knowledge of the plant's role in the plant's mind from the outset. Rather, usually, a person combining certain inclinations and also subject to efficient strings held by the controller is encouraged to pursue a career in the targeted organization.
There is a parallel to the case of the Nazi organization in this practice. Rudolf Hess, Hermann Goering, Heinrich Himmler, Rosenberg, and so forth, did not spontaneously join the fledging Nazi organization of Bavaria. They were assigned to join it, or encouraged to join it, by top political-intelligence operatives for the ruling house of Bavaria, the Wittelsbachs.
The Wittelsbachs were British clients and British agents-of-influence. Major-General Professor Karl Haushofer, in cooperation with British agent Houston Chamberlain, selected Hitler to head the Nazi organization. Haushofer directed the writing of Hitler's Mein Kampf, and assigned his own personal aide, Rudolf Hess, to Hitler. Haushofer was nominally a political-intelligence operative for the Wittelsbach House, but with the closest relationship to ruling circles of British intelligence, and so much an agent for British geopolitical doctrines and policies that he was in fact a British agent. All of the inner circle of the original, Bavarian kernel of the Nazi Party were assigned to Hitler by the Wittelsbach political intelligence circles in a manner not too different from Bernstein's entry into the Social Democracy.
René Monzat relate également que lorsqu'une tempête éclate en Europe en 1975-1976, le POE avance "l'hypothèse très vraisemblable que cet ouragan a été délibérément et artificiellement renforcé, sinon créé, sur l'ordre du Conseil national de sécurité américain que contrôlent Nelson Rockefeller et Henry Kissinger" (op. cit., pages 249-250).
Enfin, le site Conspiracy Watch (3) affirme que "nul autant que [Lyndon LaRouche] ne perçoit à ce point le monde à travers le prisme de la théorie du complot". Détaillant: "Il est ainsi persuadé que l'accession de Hitler au pouvoir en Allemagne a été planifiée par le Royaume-Uni; que les Beatles sont une émanation des services de propagande britanniques; que l'administration Bush a elle-même commandité les attentats du 11 septembre; que le contenu des Protocoles des Sages de Sion est authentique; que la reine Elisabeth Il contrôle le trafic de drogue international; que l'homosexualité est un coup du KGB… et la liste est loin d'être exhaustive!"
-> continuité: la promotion de grands programmes technologiques
Au milieu des années 1970, le POE cite parmi les éléments de la "reconstruction socialiste de l'économie" le "développement de la fusion thermonucléaire contrôlée" (tract du 5 novembre 1974). Les larouchiens estiment même que "le mouvement ouvrier européen doit viser la mobilisation de ses forces par-delà les frontières nationales, tout en ayant recours à la dissuasion de l'arsenal nucléaire du bloc soviétique pour ligoter la fraction impérialiste des Rockefeller" (Nouvelle Solidarité, 11 mars 1975).
Parallèlement à ses activités politiques, Lyndon LaRouche a créé en 1974 la Fondation pour l'Énergie de Fusion (FEF). Dans la présentation qui figurait sur l'ancien site Internet de sa revue, Fusion, il était précisé que "la FEF est née au moment où les grands programmes technologiques américains (le programme spatial, mais aussi le programme de recherche sur la fusion nucléaire) commençaient à subir de fortes réductions budgétaires".
À la fin des années 1970 et dans les années 1980, les larouchiens se font les défenseurs des "armes à faisceaux de particules" ou "à rayon". René Monzat assure ainsi que le POE a "servi avec succès de lobby international, pour le plus gigantesque projet du complexe militaro-industriel américain", puisque Ronald Reagan annonce le 23 mars 1983 le lancement de la Strategic Defense Initiative. De fait, les cheminadistes en revendiquent la paternité, racontant que l'Initiative de défense stratégique (IDS) a été "lancée par Lyndon LaRouche et reprise par Reagan en 1981". Le programme présidentiel de Jacques Cheminade parle aujourd'hui de la "création d'une Initiative de défense terrestre (IDT), proposée par la Russie, visant à défendre notre planète contre d'éventuels dangers humains et naturels: positionnement de satellites dotés d'armes à énergie dirigée, susceptibles d'arrêter dans leur trajectoire des missiles porteurs d'armes nucléaires, et d'un autre dispositif commun de satellites organisant une veille climatique et sur les corps célestes susceptibles de menacer la Terre". Poursuivant: "Les armes à énergie dirigée (lasers, armes à faisceaux de particules...) ainsi que les armes à pulsions électromagnétiques nous sont particulièrement nécessaires, tant pour notre défense de l'avenir que par leurs technologies qui nous permettront de jouer un rôle dans l'IDT".
C'est parallèlement dès cette époque que les larouchiens s'intéressent à l'Afrique. "Du 27 au 29 juin 1979, Jacques Cheminade et des représentants de la Fondation pour l'Énergie de Fusion tinrent une grande conférence sur 'l'industrialisation de l'Afrique', rappelle le site de Solidarité et Progrès. On y présenta notamment la perspective hardie d'y bâtir des nuplexes, complexes agro-industriels créés autour de centrales nucléaires. Il y fut aussi question de développer un système de grands bassins régionaux, d'où partiraient des canaux pour irriguer les pays du Sahel et faire reculer la sécheresse." Au sujet de l'Afrique, sur le site de Solidarité et Progrès a par ailleurs longtemps figuré un texte prétendant que "la catastrophe du sida est le résultat d'une politique délibérée, voulue par certains cercles dirigeants de l'oligarchie anglo-américaine et de ses alliés, pour dépeupler les pays en voie de développement".
Aujourd'hui, la perspective de Jacques Cheminade est davantage eurasiatique qu'eurafricaine à travers l'idée d'un "Pont terrestre eurasiatique permettant de désenclaver les territoires, de tracer des corridors de développement Ouest-Est et Nord-Sud mobilisant des hommes, la production d'énergie et des transports à grande vitesse". Ici encore pointe l'énergie nucléaire: "C'est dans le cadre du projet de Pont terrestre eurasiatique et l'optique de grands travaux à l'échelle mondiale, clés d'une reprise de l'économie de notre planète, que le nucléaire pourra donner sa pleine mesure".
Plus surprenant, Lyndon LaRouche propose de "mettre Mars à notre portée grâce à la fusion thermonucléaire": "La clé de l'avenir est la mise en place d'un corridor thermonucléaire entre la Terre et Mars, via la Lune, peut-on ainsi lire sur le site de Solidarité et Progrès (article mis en ligne le 19 janvier 2012). Ceci est envisageable à condition de développer les moteurs à fusion thermonucléaire qui mettront Mars à notre portée, en une semaine, alors que par les méthodes actuelles de propulsion on mettrait 200 à 300 jours, trajet que les astronautes ne survivraient pas!" (lire à ce sujet sur son site de campagne ses propositions sur l'espace).
Jacques Cheminade, un candidat comme les autres? À vous d'apprécier...
(1) Jean-Yves Camus et René Monzat, Les droites nationales et radicales en France, Presses universitaires de Lyon, 1992, page 291.
(2) René Monzat, "Le Parti ouvrier européen. Une paranoïa maîtrisée au service du renseignement", dans Enquêtes sur la droite extrême, Le Monde Éditions, 1992, pages 247-267.
(3) Site dont j'avoue ignorer personnellement le sérieux, mais qui l'est suffisamment pour être cité dans Le Monde par mon confrère Abel Mestre, grand spécialiste de l'extrême droite: "Qui est Jacques Cheminade, candidat conspirationniste?".
21 commentaires
Ben la colonisation de Mars, ça, c'est un projet d'avenir ! ;)
Je ne comprends pas trop l'intérêt de ces candidats anonymes. C'est certes la démocratie, mais n'est-ce pas surtout venir encombrer le débat avec des personnes qui ne sont la que pour faire un coup d'éclat ou tout du moins un coup de pub ?
Question subsidiaire: quels réseaux ont bien pu lui permettre de réussir là où un ancien premier ministre a échoué; rassembler les 500 parainnages?
Même question que Fabien.
vhine, l'intérêt, c'est que les candidats anonymes justement ne viennent pas des gros partis.
Les gros partis se partagent le pouvoir médiatique et multiplient les collusions avec l'oligarchie financière, et souhaitent gouverner à la place des français.
Pour cela, ils postent des candidats à leurs primaires qui sont tous conformes aux intérêts du capital : libéralisme, européisme, bellicisme...
Ensuite, ils financent et donnent principalement accès aux médias à ceux qui les conviennent le mieux, de façon à influer au maximum sur l'expression populaire, qui en général, ne dispose pas des connaissances nécessaires pour comprendre les mécanismes que j'expose ici.
Même en cas de problème et si le candidat choisi un troisième ou quatrième homme (cas de Chirac 1995, Mitterrand en 81...), il n'y a rien de dramatique car ils les ont tous financés et disposent parfois de dossiers sur eux capable de mettre à mal leur légitimité (d'où l'immunité présidentielle, mais qui ne s'applique pas à sa popularité, ni à ses proches, comme on l'a vu avec l'affaire Juppé...)
Ainsi quel que soient le candidat que les électeurs choisissent, l'oligarchie dispose déjà d'une longueur d'avance pour être sûr que les délocalisations le chômage, la staglation continuent à leur meilleur profit, paupérisant les classes moyennes un peu plus depuis 40 ans.
L'intérêt donc de ces "candidats anonymes", c'est donc de pouvoir donner au peuple les moyens de contrer l'oligarchie. C'était la grande idée de Gaulle, et il s'est battu très violemment avec ceux qui alors tenaient les rênes en France pour que les français obtiennent par référendum en 1962 le droit de voter pour leur président, c'est à dire dans l'esprit de De Gaulle, n'importe quel français.
Il ne voulait précisément pas de la règle des parrainages, mais de guerre lasse avec Pompidou il finit par transiger sur la règle de 100 parrainages pour pouvoir présenter son référendum. Ensuite, la règle des parrainages n'a eu de cesse d'être rendu plus inaccessible pour éviter que des candidats hors systèmes ne viennent "voler" le pouvoir à ceux qui le détiennent déjà : les partis, et ceux qui les financent...
En 1976, sous prétexte de "problèmes liés à l'organisation du scrutin" le conseil constitutionnel modifia la règle des parrainages qui devint plus stricte en passant de 100 à 500 parrainages, rendus publics.
Dans les années 1990, développement de l'intercommunalité qui créé des dépendances des élus à un ensemble politisé par l'un des deux ou trois partis majoritaires en France. Les élus non-encartés signaleront désormais au téléphone dans de nombreux cas ils ne veulent pas donner leur signature de peur de mesure de rétorsion sur les budgets et subventions alloués à leur commune, s'ils choisissent un candidat contraire au volontés du parti UMPS du président de l'intercommunalité.
En 2002, la publication dans le journal officiel des parrains, suite à la présence de Jean-Marie Le Pen au second tour, fait grand bruit dans les médias. De nombreux maires ayant fait des parrainages en faveur de Le Pen ou de la kyrielle de petits candidats de gauche, jugés responsable de l'émiettement du score de Jospin, sont stigmatisés dans les journaux locaux et dans les communes par les habitants, ajoutant une seconde peur à la première menace de pression: déplaire à ses élus en ayant soutenu un candidat qui forcèment, ne peut pas rassembler 100% des opinions d'un village.
Les maires décident alors de se désengager massivement de la problématique des parrainages, et hors des encartés qui se doivent d'appliquer consignes des partis, l'immense majorité des non-encartés pratiquent désormais l'absention active.
L'obtention des parrainages est devenu ainsi un parcours du combattant colossal, nécessitant un dispositif d'appel téléphonique, de harcèlement, de déplacement dans tout le territoire national impliquant au bas mot 50.000km de route. Cela peut paraître sympatique et folkorique, mais pendant ce temps là, plus de 45 candidats qui avaient pour moitié d'excellentes idées pour la France n'ont pas pu se présenter, s'arrachant entre eux les précieux sésames et réduisant d'autant les chances à l'un d'eux de l'emporter.
Ainsi ne connaîtrez-vous jamais des gens comme François Asselineau, Jean-Marc Governatori, François Amanrich, Stéphane Guyot...
D'autant que les médias auront tout fait pour ne jamais leur donner de temps d'antenne, tout en discréditant l'idée de "candidats du peuple" comme l'entendait de Gaulle, en les catégorisant systématiquement de "petits candidats", et en faisant parader quelques farfelus comme Cindy Lee ou Dédé L'abeillaud pour achever de vous convaincre que ces candidatures sont nuisibles, qu'ils sont TOUS forcément là pour se faire "un coup de pub".
Le système en place achève de vous convaincre en cela qu'il montre des sondages ridicules en la faveur de ces nouveaux venus - et pour cause, ils ne sont pas connus ! En se basant sur ces sondages, ils n'accordent donc aucun temps d'antenne, et ces mêmes candidats restent donc dans l'ombre et n'ont aucune chance de décoller dans les sondages. Mieux, les sondages obstinément faibles amènent les électeurs à s'aligner sur eux, sous forme de "prophétie autoréalisatrice", car par soucis du vote utile, ils ne voient pas l'intérêt de voter pour un candidat qui n'aurait virtuellement aucune chance de gagner. La boucle est bouclée.
C'est un véritable tour de Force de M.Cheminade d'y être parvenu. Il faut dire qu'il a cherché à se présenter depuis 1974 et avait réussi à réunir les 500 en 1995, ce qui a mis toutes les chances de son côté en matière de savoir-faire et de carnet d'adresses des maires fidèles à ses idées.
Tout ce petit résumé historique pour dire en fait une seule chose: essayez de vous ouvrir au rapport de force discret mais en réalité sans merci que livrent les partis et les tenants du pouvoir contre toute forme d'expression populaire (le "non" au TCE lors du référendum de 2005, converti en traité de Lisbonne malgré tout 3 ans plus tard ne vous aura pas échappé).
Cette expression populaire ferait voler en éclat leurs prébandes, leurs avantages mais surtout risquerait d'initier le peuple à des idées "interdites" par le simple temps d'antenne accordé à des candidats qui disent autre chose que les idées qu'ils veulent que vous preniez pour bonnes.
Ainsi, aucun candidat ne vous expliquera que sortir de l'Union Européenne est la solution pour retrouver la croissance, réduire le chômage et éviter les délocalisations. François Asselineau aurait pu.
Aucun candidat ne vous proposera de démissionner immédiatement en organisant une constituante "élu par le peuple et pour le peuple" pour refonder la démocratie. Stéphane Guyot aurait pu.
Aucun candidat ne vous parlera des mécanismes du tirage au sort des députés, alternative aux partis. François Amanrich aurait pu.
Aucun candidat ne vous parlera des énergies alternatives et de la sortie du nucléaire sans se laisser poser ses conditions par Areva comme le font EELV. Jean-Marc Governatori aurait pu.
Mais ces 4 candidats, sans parler des 45 autres, ne pourront pas, et quand dans quelques mois ou années, la crise économique nous emmènera à la situation de la grèce, quand l'Europe inféodée à l'OTAN américaine attaquera l'Iran, quand un accident nucléaire surviendra et que nous serons seulement 54° producteur mondial de solaire pour y palier, ou quand enfin 4 millions de personnes marcheront dans la rue et qu'on les réprimera dans la rue avec des lacrymos classées NBC, alors le peuple viendra pleurer et comprendra ce que pourtant il était possible d'agir avant, en lisant un seul petit commentaire, perdu ici sur ce blog.
Bravo enfin si vous m'avez lu - je suis heureux que les "anonymes" puissent se rendre utiles...
Un "original". On peut s'interroger sur une telle candidature, qui a quand même réuni plus de 500 signatures (comment les maires ont-ils été convaincus ?). Il ne fera qu'un petit score, n'a pas de parti réel et ne peut prétendre à gouverner le pays ni même avoir un rôle influent. Il risque aussi d'y perdre beaucoup d'argent, ayant déjà été ruiné en 2002 (comptes de campagne invalidés). Alors que cherche-t-il ? Que veut-il démontrer ?
@skyrl: je suis le premier à défendre le pluralisme des candidatures à l'élection présidentielle ...à condition que ces candidatures représentent un courant d'opinion réel!
C'eut été le cas de François Asselineau, de Corinne Lepage, de Carl Lang, de Patrick de Villenoisy ou de Clément Wittmann. Ce n'est pas le cas de Jacques Cheminade (cf. ma note).
http://www.la-croix.com/Actualite/S-informer/France/Presidentielle-Ces-petits-candidats-qui-veulent-se-faire-entendre-_EP_-2012-03-15-778791
@Laurent de Boissieu: M. Boissieu, quel que soit le respect que vous ayez pour M. Asselineau, et celui que nombre d'adhérents de l'UPR ont pour vous (vous êtes souvent cité), je me permets de vous dire que l'article "Parrainages, l'heure de vérité" publié dans votre journal, ne nous a pas simplifié la vie, et d'une façon plus criante encore, le refus des 57 médias nationaux dont le vôtre, de répondre favorablement à toute présentation du candidat, a eu raison auprès des maires de toute crédibilité du courant d'opinion de qu'incarne M. Asselineau.
J'imagine qu'il n'est pas simple pour vous de prendre la responsabilité d'ouvrir vos colonnes à 4, 6 ou 8 petits candidats "crédibles" - mais le pluralisme est à ce prix, et j'espère que vous serez à l'avenir plus coopérant dans cette démarche, et pour qu'en 2017 nous n'assistions pas à la mise à mort par le ridicule des "candidats anonymes". M. Asselineau se tient disponible pour tout article ou entretien, et je suis sûr que la rencontre avec l'homme serait pour vous et pour lui un échange d'une grande qualité humaine et intellectuelle.
Contactez-moi pour que nous gardions nos coordonnées, si vous êtes disposé à une telle rencontre programmée que ce soit pendant la campagne ou après.
Cdlt
@skyrl.
La Croix n'a absolument pas à rougir de la façon dont nous traitons, à chaque élection et depuis des années, les "petits" candidats.
J'y veille personnellement, étant passionné par le débat d'idées et par la vie politique: sur me sites personnels je recense ainsi 679 fiches de partis politiques français (http://www.france-politique.fr/wiki/Catégorie:Partis_politiques ) et 1.676 fiches de partis politiques étrangers (http://www.europe-politique.eu/wiki/Catégorie:Partis_politiques ). Je suis par ailleurs un des seuls (si ce n'est le seul!) à recenser systématiquement depuis la création de mon site l'ensemble des "petits" candidats aux élections présidentielles, des plus sérieux aux plus farfelus:
http://www.france-politique.fr/candidatures-presidentielle-2002.htm
http://www.france-politique.fr/candidatures-presidentielle-2007.htm
http://www.france-politique.fr/candidats-presidentielle-2012.htm
Pour le reste, je ne ferais aucun commentaire public sur les choix rédactionnels qui ont été opérés à La Croix autour des "petits" candidats dans la recherche de leurs parrainages. Mais j'ai ma conscience de journaliste et de citoyen avec moi quant à mes propositions d'articles (retenues ou non).
Concernant plus particulièrement François Asselineau, j'ai parlé de lui et de l'UPR dans La Croix en 2007, 2008, 2010, 2011 et 2012. J'aurais certainement parlé de lui en 2009 s'il avait formé des listes aux élections européennes.
Pour ce qui est de le rencontrer, je vous remercie mais je le connais sans doute aussi bien si ce n'est mieux que vous...
Cordialement.
@Laurent de Boissieu:
Bien, je vous remercie de faire preuve d'une telle transparence et de professionnalisme, sans compter votre disponibilité à répondre ici même.
Je découvre en effet par les adhérents qui me l'ont signalé que vous avez des rapports personnels avec FA de longue date. Navré de mon ton quelque peu réprobateur : la percée dans les médias a été si difficile que nous en sommes parfois un peu remontés. L'article du 13 mars sur la défaite annoncée de M.Asselineau n'était pas agréable, mais vous n'y êtes pour rien.
Si tous les journalistes appliquaient vos standards en matière d'équité de la représentation des courants politiques, nul doute que l'histoire serait bien différente aujourd'hui pour nombre de petits candidats.
Mes meilleures salutations
Cdlt
Erreur sur votre site, page candidat présidentielle 2012 :
Robert Baud avait retiré sa candidature en faveur de Jacques Borie le 5 janvier 2012. Suite au retrait de Jacques Borie pour Jean-luc Mélenchon, il appellera également a voter pour ce dernier. Cordialement J.Bizet (sources : http://jacques.borie.over-blog.com/
Merci: il s'agit davantage d'une mise à jour que d'une "erreur" :)
Effectivement, c'est plutot une mise a jour ;)
Merci pour votre rapidité
Pour revenir au fond de la question posée "qui se cache derrière Jacques Cheminade ?" , notons que bien qu'il cite allégrement Jaurès, de Gaulle ou Mendès France, conformément à la phraséologie habituelle de Solidarité & Progrès, il ne fait jamais référence à la République mise à part peut être en citant la fonction de "Président de la République" ou en dénonçant les propos et postures d'autres partis ou candidats.
Les statuts de S&P ne font pas non plus référence à la République. En revanche le parti a pour objet de lutter contre "l'usure financière ". La rupture idéologique totale avec l’extrême droite reste encore à démontrer.
Des gogos limite sectaires.
Etonnant qu'ils aient 500 signatures
@Laurent de Boissieu
Vous êtes pourtant un bon journaliste, à la base. On le voit quand vous vous résignez à le montrer. Mais puisque vous dites vous même que "Jacques Cheminade ne représente pas un courant d'opinion réel", pourquoi vous intéressez-vous à lui ? Personne n'en a rien à f... de ce monsieur, sauf peut-être sa grand-mère, et encore, si elle est particulièrement indulgente.
Cela me rappelle vos analyses byzantines sur les 342 527 courants qui cohabitent au sein de l'UMP.
Je le répète, vous êtes un bon journaliste. Alors montrez-le ! Pour la première fois depuis quarante ans, le paysage politique français va CHANGER. Comment ? En bien ou en mal ? Je ne sais pas. Mais il va CHANGER.
Montrez qu'en bon journaliste que vous êtes vous l'avez compris, au lieu de vous consacrer à des insignifiances !
S'il vous plaît ?
@Sancelrien: Le paysage politique est encore aujourd'hui dessiné entre gaullistes, centristes et socialistes, et non "gauche"/"droite", qui ne veut rien dire (regardez n'importe quelle encyclopédie, dictionnaire politique).
de Gaulle lui-même et ses résistants n'étaient qu'une poignée. Des dizaines de micro-mouvements se sont coalisés, et toutes les forces non collaboratrices bien modestes par rapport à l'état de vichy se sont coalisés dans le CNR.
Alors dans l'affaire c'est vous qui tapez sur les petits, et ne voyez pas par où le changement PEUT arriver. Vous ne comprenez rien à l'immense courage de M. Cheminade, à comme dit-il, remuer les lèvres devant les puissants. Ce que vous croyez être chez lui du conspirationnisme est du discernement, et nous vivons une époque bien trop politiquement correct pour entendre un seul de ses énoncés pourtant brillant.
Allez un peu sur les autres sites de M. de Boissieu. Vous verrez peut-être qu'être résistant au 21° siècle, c'est oser comprendre l'ordre complexe.
@skyrl
Si vous voulez penser que Monsieur Cheminade peut changer quoi que ce soit à quoi que ce soit, libre à vous.
Si vous voulez penser que s'intéresser à lui c'est "être résistant", libre à vous.
Le seul point sur lequel je suis d'accord avec vous, c'est que les mots "gauche" et "droite" ( que je n'utilise d'ailleurs pas dans mon billet ) ont été vidés de tout sens depuis longtemps par l'ignoble classe politique française. Et en plus, où voyez-vous des gaullistes ? A l'UMP, peut-être ? Où voyez-vous des socialistes ? Au P.S, peut-être ?
Cordialement.
@Sancelrien:
Tous les gaullistes sont éclatés en des dizaines de micro-partis comme S&P, l'UPR, Comité Valmy, etc.. Et sont aussi dans les gros partis, en sous-marin, avalant des couleuvres chaque jour plus longues et plus épaisses, et trahissant par ce biais chaque minute un peu plus leurs idéaux.
24% des Français se reconnaissent gaullistes à une époque où 80% savent encore ce que c'est.
S'il ne fallait parler que de ce qui peut changer les choses, alors on aurait jamais parlé de l'idée même d'arrêter l'esclavage et ça ne serait jamais arrivé, non ?
Ne pensez-vous pas que les petits partis ont un rôle essentiel dans le débat d'opinion ? Que le rôle de leurs militants est un des derniers contrepouvoir à la fabrique des opinions par les médias de masse et le consensus du bipartisme ? Les opinions irriguent les grands partis, les français, leurs choix de vote ou surtout de non-vote, leurs choix de consommation et de non consommation de révolte et de soumission.
le plus simple est de supprimer l'élection du président de la république et d'établir un proportionnelle pour l'élection des députés VIVE LA VI° République
@Jean Rémignard:
C'est vraiment mal se rendre compte que revenir à la IV° République ne seras pas une avancée démocratique pour le peuple. La preuve a été faite que plus vous avez de niveaux dans la nomination d'un gouvernement, moins c'est démocratique. Là vous en aurez quatre:
- Quels sont les hommes qui auront les moyens de se présenter aux députales -> donc qui les finance -> l'oligarchie, les partis
- Quels sont les candidats députés que les médias vont promouvoir -> l'oligarchie choisit
- Quel est le premier ministre nommé par la majorité des parlementaires -> les partis choisissent, donc l'oligarchie
- Quels sont les ministres que le premier ministre nommera -> le premier ministre, mais n'ayant de légitimité qu'indirecte via l'assemblée, ce sera la valse des ministres selon les opinions changeantes de l'assemblée
= INGOUVERNABLE.
Le mécanisme du suffrage universel de 1962, arraché de haute-lutte, permettait aux français de choisir directement n'importe quel homme (initialement, 100 parrainages anonymes), chacun devant être représenté à l'égalité par les médias (qui ont détourné la contrainte avec le principe d'équité de pré-campagne), ce même président choisissant son premier ministre et les ministres qui présentés à l'assemblée pouvait gouverner.
Dans la pratique le régime s'est corrompu, et les cohabitations (refus de démission ET refus de l'exercice politique du président en nommant une personnalité neutre) + 500 parrainages (sélection des candidats par les partis) ont retransformé la V° en IV°.
De mon point de vue, il ne faut pas perdre l'avancée démocratique que fut le mécanisme populaire de l'élection présidentielle. Il faut revenir au mode de 1962.
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