Études électorales : les élections européennes 2009
13 février 2009
La nouvelle répartition des sièges dans les circonscriptions européennes au regard des résultats des européennes de 2004 et de la présidentielle de 2007
Dans les états-majors politiques, les calculatrices surchauffent pour préparer les élections européennes du 7 juin. En jeu, la nouvelle répartition des sièges dans les huit circonscriptions européennes, puisque la France aura six représentants de moins au Parlement européen (72 au lieu de 78). En projetant cette nouvelle répartition sur les résultats de 2004, nous avons déterminé, toutes choses égales par ailleurs, quels auraient été les gagnants et les perdants de ce changement. Enfin, pour compléter cette analyse, nous avons agrégé les scores des candidats à l'élection présidentielle de 2007 par circonscription européenne, puis calculé le nombre d'élus potentiels.
Même avec six sièges de moins à pourvoir, l'UMP, Les Verts, la droite souverainiste et les communistes auraient obtenu en 2004 le même nombre d'élus au Parlement européen. Les perdants auraient été le PS (trois sièges de moins : Ouest, Nord-Ouest, Île-de-France), le MoDem (deux sièges de moins : Est, Centre – Massif central) et le FN (un siège de moins : Nord-Ouest). Au total, la répartition aurait donc été la suivante : 28 PS (au lieu de 31), 17 UMP, 9 MoDem (au lieu de 11), 6 FN (au lieu de 7), 6 écologistes, 3 MPF, 2 PCF et 1 Parti communiste réunionnais. Contrairement à ce que nous aurions pu spontanément imaginer, ce ne sont donc pas les plus "petits" partis (MPF, PCF) qui auraient été les premières victimes d'une réduction du nombre de sièges à pourvoir.
En projetant, cette fois, le score des candidats à la dernière présidentielle dans les circonscriptions européennes, les bouleversements sont encore plus importants. Aussi bien Les Verts que le PCF et le MPF se trouvent exclus de la répartition des sièges, puisqu'ils sont partout en dessous de 5% des suffrages exprimés. Outre les quatre candidats arrivés en tête à la présidentielle (Nicolas Sarkozy, Ségolène Royal, François Bayrou puis Jean-Marie Le Pen), Olivier Besancenot est le seul à dépasser ce seuil, dans une unique circonscription européenne (Nord-Ouest). Mais sans toutefois être en mesure de décrocher un élu au Parlement européen avec le mode de scrutin en vigueur (représentation proportionnelle à la plus forte moyenne). À noter toutefois que dans les sondages le Nouveau Parti Anticapitaliste (NPA) est aujourd'hui crédité du double du score obtenu par Olivier Besancenot en 2007.
En transposant dans les circonscriptions européennes le score de Ségolène Royal au premier tour de la présidentielle, le PS perd entre un et deux sièges partout en métropole, sauf dans le Sud-Ouest où il conserve le même nombre d'élus. En Outre-mer, en revanche, le PS en gagne un. Soit, globalement, la perte de cinq sièges supplémentaires. À l'inverse, compte tenu de sa contre-performance aux dernières élections européennes et de l'excellent score de Nicolas Sarkozy au premier tour de la présidentielle, l'UMP gagne dix sièges. Les européennes sont toutefois rarement favorables au parti majoritaire, et l'UMP est très loin, dans les sondages, du niveau de son champion à la présidentielle.
Autre gagnant : le MoDem. Le score record de François Bayrou à la présidentielle lui fait en effet miroiter l'espoir de conserver tous les sièges de l'UDF en 2004 voire d'en obtenir trois supplémentaires (Nord-Ouest, Ouest, Sud-Est). En définitive, le niveau du MoDem pourrait se trouver quelque part entre les européennes de 2004 et la présidentielle de 2007. Les deux sièges les plus incertains étant l'unique élu dans le Centre – Massif central et le second élu dans l'Est. Ce qui permet de décrypter les débats internes dans la désignation de ses têtes de liste. La jeune Parisienne Quitterie Delmas ayant refusée d'être parachutée dans le Centre – Massif central. Tandis que le Rémois Jean-Marie Beaupuy sera muté dans cette dernière circonscription afin de laisser dans l'Est la place au journaliste Jean-François Kahn.
Enfin, le second siège du FN dans le Nord-Ouest serait dans toutes les hypothèses perdu. Ce qui explique notamment pourquoi le sortant Carl Lang présente sa propre liste dissidente après avoir refusé d'être deuxième derrière Marine Le Pen, qui quitte définitivement l'Île-de-France où elle avait été élue en 2004. Contrairement au MoDem ou aux écologistes (Europe Écologie), le FN ne semble effectivement pas pouvoir miser sur une quelconque dynamique électorale pour compenser la réduction du nombre de sièges à pourvoir en France.
Laurent de Boissieu
© La Croix, 13/02/2009
Lire le détail des chiffres de l'étude :
http://www.france-politique.fr/elections-europeennes-2009...
8 commentaires
Très beau travail qui permet de situer les enjeux.
La question qui se pose à ce jour est relative à la "nouvelle" répartition des 72 sièges qui sera arrêtée.
Doit-on d'ores et déjà considérer la répartition annoncée en Conseil des ministres du 28 janvier dernier comme définitive ?
Bien cordialement
http://partisocialliberaleuropeen.hautetfort.com/archive/2009/02/13/europeennes-modem-et-ps-partent-avec-un-handicap.html
Mr pouvez vous parler de EDE
Merçi
Cet article est plus qu'utile. Cependant, sur le cas Quitterie, je ne peux pas partager votre opinion : avec un MoDem autour de 15 % dans une région qui va compter 5 élus, il aurait fallu, pour que Quitterie ne soit pas élue, que le PS et l'UMP franchissent tous les deux la barre des 30 %, ce qui n'est pas vraisemblable au vu des résultats passés et des projections actuelles. Quitterie aurait certainement été élue. Ce qu'elle a choisi est, de sa part, un acte politique extrêmement fort et pensé.
@Thierry P.: oui, il s'agit bien de la répartition des sièges qui sera retenue dans le décret fixant le nombre de sièges à pourvoir.
@millet : le résultat des listes EDE a bien été pris en compte dans les sept circonscriptions concernées, mais dans aucune d'entre elle EDE ne dépasse les 5% des suffrages exprimés.
@Hervé Torchet : 10,0% (score de l'UDF en 2004 dans la circonscription Massif central - Centre) donne un siège pour 6 à pourvoir, et aucun siège pour 5 à pourvoir; 18,9% (score de François Bayrou à la présidentielle dans cette même circonscription) donne effectivement un siège pour 5 à pourvoir (cf. mon tableau sur France Politique)
@ L de B
Pardon d'y revenir mais à 10 %, il aurait fallu que l'un des deux autres soit à 30 % et l'autre à 20%, puisque selon le principe de la plus forte moyenne, on calcule en fonction de la moyenne de pourcentage à n+1 sièges et donc la moyenne étant à 10% pour le MoDem en l'occurrence, la moyenne sur 3 sièges à 10 % est supérieure à 30 % et pour 2 supérieure à 20 %. Même à ce score-là, la probabilité de perdre est très faible. À 12 %, il faudrait 36 % et 24 %, ce qui n'est pas imaginable.
Le seul point qui me gêne dans votre argumentaire est que Quitterie ait pu reculer par peur d'être battue, car sa motivation est autre. Pardon d'y être revenu, mais ce point m'a paru mériter mise au point.
@Hervé Torchet. J'ai bien calculé circonscription par circonscription, avec les scores obtenus en 2004, la répartition des sièges en fonction du nouveau nombre de sièges à pourvoir. Dans la circonscription Massif central - Centre, on a effectivement PS 31,23% (440 249 voix), UMP 20,36% (287 085 voix), UDF 9,96% (140 477 voix), etc.; à 3 066 voix près, le dernier siège est attribué à l'UMP et non au MoDem (UDF en 2004).
Sur Quitterie Delmas, je comprends que ma phrase la concernant puisse être mal interprêtée. Je ne pense pas en effet qu'elle soit partie parce qu'on lui proposait une place dont l'éligibilité est incertaine; je pense en revanche qu'elle est partie parce qu'elle ne voulait plus d'une certaine façon de faire de la politique qui a fait notamment que François Bayrou lui proposait une tête de liste dans le cadre d'un parachutage...
Bravo pour le travail et les calculs réalisés !
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