Les souverainistes de l'UMP, une espèce en voie de disparition
05 juillet 2008
Pour la deuxième fois depuis son élection à la présidence de la République, Nicolas Sarkozy devrait s'exprimer devant le conseil national de l'UMP. Dans les deux cas, le président de tous les Français a souhaité donner une coloration européenne à ses retrouvailles avec les militants de droite. Le 12 janvier dernier, il était intervenu en compagnie de Tony Blair, ancien premier ministre britannique. [Aujourd'hui], il devrait être entouré du président de la commission européenne, José Manuel Barroso, et du président du Parlement européen, Hans-Gert Pöttering.
L'unanimité que suscite la venue de ces personnalités, habituellement cibles favorites des souverainistes, témoigne de la marginalisation grandissante des eurosceptiques au sein de l'UMP. En février 2005, seuls huit députés et trois sénateurs UMP et apparentés avaient voté contre la révision constitutionnelle préalable à la ratification du traité constitutionnel européen. Trois ans après, il n'y avait plus que trois députés UMP (Patrick Labaune, Philippe Meunier, Jacques Myard) et deux sénateurs (André Lardeux et Charles Pasqua, apparenté) à ne pas autoriser la ratification du traité de Lisbonne, qui reprend une partie des anciennes dispositions de la Constitution européenne rejetée par les Français.
La situation a, en effet, radicalement changé par rapport aux débats sur le traité de Maastricht. En 1992, 69% des sympathisants RPR avaient voté "non", 31% "oui". En 2005, 76% des sympathisants UMP ont voté "oui", 24% seulement "non". Plusieurs facteurs expliquent ce retournement, à contre-courant de l'ensemble des Français (49% de "non" en 1992, 55% en 2005). D'une part, si le RPR a, certes, fourni le gros des troupes de l'UMP, ce dernier parti englobe également une partie de l'UDF historique, premier parti à avoir proposé un projet de Constitution européenne. D'autre part, la création de l'UMP n'a également été possible qu'en raison de la normalisation de la droite gaulliste. Si les gaullistes siégeaient sur les bancs de droite des assemblées parlementaires, leur doctrine ne possédait originellement pas les attributs classiques des autres droites européennes, libérales, atlantistes et favorables à une Europe supranationale. Le symbole de leur ralliement à cette dernière étant, justement, le soutien apporté par Jacques Chirac au traité de Maastricht.
Au fil du temps, les gaullistes ont donc soit rallié l'actuelle construction européenne, soit créé leur propre parti, lorsqu'ils n'ont pas changé de position. Parmi les premiers se trouvent le chef du gouvernement, François Fillon, ou les ministres Gérard Larcher et Roger Karoutchi (fondateur du Cercle République et Patrie). Parmi les seconds figurent le parlementaire européen Paul-Marie Coûteaux (Rassemblement pour l'indépendance et la souveraineté de la France), l'ancien conseiller de Paris pasquaïen François Asselineau (Union populaire républicaine) et le député Nicolas Dupont-Aignan. Ce dernier a quitté l'UMP l'année dernière et prépare, pour le 23 novembre prochain, le congrès fondateur de son parti, Debout la République. Des partis qui concurrencent à droite le Mouvement pour la France de Philippe de Villiers (ex-UDF), plus national-libéral que gaulliste.
Il ne reste donc plus à l'UMP qu'une poignée de parlementaires pour considérer que la défense de la souveraineté nationale est une composante essentielle du gaullisme. Finalement, Jacques Myard est le dernier à tenter de structurer la sensibilité gaulliste et souverainiste au sein de l'UMP. Fondateur du Cercle Nation et République, le député a même rédigé le "plan B" des souverainistes : un projet de "Pacte des Nations" européen.
Laurent de Boissieu
© La Croix, 04/07/2008
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