L'avenir du Sénat en débat
29 mars 2007
Éclairage
"Dans la réforme des institutions, moi, cela ne m'aurait pas gêné de supprimer le Sénat", a déclaré, en début de semaine, Ségolène Royal. "Il faudrait supprimer le Sénat, avait-elle déjà affirmé le 14 septembre 2005. C'est un anachronisme démocratique insupportable." Des propos qui rappellent ceux de Lionel Jospin, qui avait qualifié en avril 1998 le Sénat d'"anomalie parmi les démocraties". Contrairement à un État fédéral, où une chambre représente la population et une autre les États fédérés, un État unitaire comme la France pourrait constitutionnellement être monocaméral. Ce fut d'ailleurs le cas entre 1791 et 1795, ainsi que lors de la parenthèse républicaine de 1848-1851. C'est également ce qu'avait prévu en 1946 le premier projet de Constitution. Quant au "Sénat nouveau" proposé par Charles de Gaulle en 1969, "remplaçant à la fois le Sénat et le Conseil économique et social", il n'aurait plus eu qu'un rôle consultatif.
Ségolène Royal a toutefois renoncé à reprendre la suppression du Sénat dans son "pacte présidentiel" et avance trois propositions. Tout d'abord, "instaurer le non-cumul des mandats pour les parlementaires". Classique pour les députés, qui représentent la nation, cette proposition est plus originale pour les sénateurs, le Sénat assurant dans la Constitution de 1958 "la représentation des collectivités territoriales de la République". Ensuite, "modifier le mode de scrutin pour l'élection des sénateurs", dans la lignée de ce qu'avait commencé à faire Lionel Jospin en 2000 en élargissant le nombre de sénateurs élus à la proportionnelle. Enfin, "supprimer le droit de veto du Sénat en matière institutionnelle". Dans la procédure législative, l'Assemblée nationale possède en effet le dernier mot, sauf pour l'adoption des lois constitutionnelles (et des lois organiques relatives au Sénat). Le Sénat est donc incontournable pour réviser la Constitution. Or, avec une majorité défavorable, il poserait à Ségolène Royal le même problème qu'il a posé à Charles de Gaulle en 1962 et 1969.
Laurent de Boissieu
© La Croix, 28/03/2007
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